Front associatif dans les Centres de rétention

Mardi 13 décembre, les cinq associations qui interviennent dans les centres de rétention administrative ont publié un rapport commun. Elles dénonçent le durcissement de la rétention des étrangers en situation irrégulière et sa banalisation.

Erwan Manac'h  • 14 décembre 2011
Partager :
Front associatif dans les Centres de rétention
© Photo : AFP / Bertrand Guay, Stephane de Sakutin

« Lieu de détresse et d’arbitraire » . Instrument d’un « criminalisation injustifiable » . Les 5 associations qui pénètrent dans les centres de rétentions administrative (CRA) pour informer et accompagnent les migrants ont clamé leur indignation d’une seule voix. Mardi 13 décembre, en publiant leur premier rapport collectif, l’Assfam, La Cimade, Forum réfugiés, France terre d’asile et l’Ordre de Malte ont aussi fait la démonstration de leur union. En rangs serrés pour 2012 ?

En 2009, lorsque le gouvernement décide d’ouvrir à la concurrence dans le cadre d’un marché public la mission d’intervention auprès des migrants retenus, la Cimade, intervenant historique, exprime de vives inquiétudes et redoute de voir l’impact politique de la mission dilué. Deux ans plus tard, elle se montre rassurée ce sur ce point. « Malgré nos histoires et nos positions différentes, nous avançons avec l’ambition commune de faire respecter les droits de l’Homme , explique d’entrée Jérôme Martinez, secrétaire général de la Cimade. Nous avons dépassé le risque de concurrence qui était l’objectif du ministère ».  

« Surenchère répressive » 

Le constat commun rendu public le 13 décembre est accablant. De concert, les cinq associations dénoncent la banalisation de la rétention et des manquements graves à l’accès aux droits. La « surenchère répressive » et une « politique du chiffre aveugle » ont précipité 60 000 personnes, dont 356 enfants, dans l’atmosphère tendue des centres de rétention. « Il n’y a plus de différence entre la rétention et la détention », alarment-elles, soulignant les méthodes carcérales qui y ont cours, jusqu’à des contraintes telles que menottage et isolements. «  Les retenus ne sont pas en infraction pénale » , martèle Pierre Henry, directeur général de France Terre d’Asile, rappelant que sur les 27 000 personnes placées en rétention en 2010, 11 000 ont été expulsées, soit 42 %. «  Cela montre l’injustice et l’inefficacité de cette politique », estime-t-il. 

-Télécharger le rapport sur les CRA

Au-delà du rapport 2010, les associations anticipent aussi sur un prochain rapport, qui devrait être rendu public début 2012 sur les premiers effets de la loi Besson qui allonge la durée de rétention à 45 jours et retarde l’intervention du juge des libertés et de la détention au cinquième jour. « On observe déjà une augmentation des actes de détresse » , s’inquiète Lucie Feutrier responsable des CRA à l’Ordre de Malte. « Pour une personne qui arrive en CRA, la perspective de pouvoir passer 45 jours en rétention est très difficilement accueillie. », renchérit de Céline Guyot de l’Assfam. La réforme du droit au séjour pour raisons médicales fait aussi craindre une aggravation de la situation sanitaire dans les CRA.

Droits au rabais

 La situation est particulièrement grave Outre-mer, où des régimes dérogatoires sont à l’oeuvre. À Mayotte 26 000 expulsions ont eu lieu en 2010 contre 28 000 pour la métropole (et 30 790 pour l’ensemble de l’Outre-mer). « C’est la face cachée de la politique d’éloignement du gouvernement , juge David Rohi, responsable de la commission éloignement de la Cimade. Quotidiennement, des parents d’enfants français sont expulsés, sans même pouvoir déposer de recours ou passer devant un juge. » L’année 2010 a été marquée par un accroissement du nombre de famille placée en rétention.


-À suivre dans Politis n°1182 du 22 décembre.

Société
Temps de lecture : 3 minutes
Soutenez Politis, faites un don.

Chaque jour, Politis donne une voix à celles et ceux qui ne l’ont pas, pour favoriser des prises de conscience politiques et le débat d’idées, par ses enquêtes, reportages et analyses. Parce que chez Politis, on pense que l’émancipation de chacun·e et la vitalité de notre démocratie dépendent (aussi) d’une information libre et indépendante.

Faire Un Don