Expulsions locatives, la triste répétition

La trêve hivernale prend fin le 15 mars. Une date couperet pour des milliers de locataires qui ne peuvent plus payer leur loyer. Le point, avant une mobilisation citoyenne dans toute la France demain samedi.

Samir Hamma  • 9 mars 2012
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Expulsions locatives, la triste répétition
© Photo : Un membre d'une communauté Emmaüs pose devant une pyramide de matelas, le 16 mars 2009 sur la place de la République à Paris, installée pour demander un moratoire des expulsions locatives au moment où prend fin la trêve hivernale. PATRICK KOVARIK / AFP

Les lois Dalo, Boutin et Apparu : une longue litanie législative dont l’efficacité reste à démontrer. Car sur le terrain, la question des expulsions locatives est toujours d’une brûlante actualité. Ce triste « marronnier » refait ainsi surface à chaque fin de trêve hivernale, et met en danger des milliers de foyers qui risquent de se faire expulser. Crise économique aidant, leur nombre n’a cessé d’augmenter.

Patrick Doutreligne, délégué général de la Fondation Abbé Pierre, estime « qu’il y a environ 140 000 assignations pour expulsion par an, soit 1 à 2 % du parc locatif. 110 000 jugements donnent raison aux bailleurs, décidant par conséquent l’expulsion du locataire  ».

Le contexte économique, notamment le chômage, et l’augmentation des charges locatives augmentent les situations d’impayés. Un problème qui «  touche toutes les catégories sociales  ». La Fondation Abbé Pierre suggère ainsi aux pouvoirs publics de mettre en place «  de vrais mécanismes de prévention  », mais également de «  privilégier la conciliation administrative entre les bailleurs et les locataires, comme c’est le cas en Allemagne, plutôt que de passer directement par l’action en justice  ».

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Le gouvernement, quant à lui, parle d’environ 10 000 expulsions manu militari. En réalité, leur nombre serait bien plus important ; il avoisinerait les «  40 000, si on prend en considération tous ceux qui anticipent l’intervention policière, et s’en vont en catimini, avec toutes leurs affaires, pour éviter l’humiliation  ». Pire, ce nombre grimpe en flèche quand on y ajoute les expulsions exécutées lors de la venue d’huissiers et les personnes qui partent d’elles-mêmes après avoir reçu le jugement définitif. C’est donc au final entre « 50 000 et 60 000 locataires qui sont mis à la porte de leur logement », regrette M. Doutreligne. Un chiffre alarmant qui tend à s’aggraver, l’État ayant réduit la part budgétaire allouée aux problèmes du mal logement. Une orientation néolibérale délibérée qui provoque l’indignation de Patrick Doutreligne : «  En ces temps de crise, il faut accroître les efforts et actionner les amortisseurs sociaux (…) C’est le contraire qui est fait depuis cinq ans(…) Cette question devrait transcender les courants de pensées et les partis politiques… C’est une question d’humanité ».

Du côté du Droit au logement (Dal), le constat est tout aussi alarmant. Jean-Baptiste Eyraud, porte-parole de l’association, parle de  « barbarie » concernant la question des expulsions locatives. Il préconise «  la suspension de toutes les expulsions et l’instauration d’un moratoire sur cette question  ». M. Eyraud va plus loin et réclame la mise en place «  de la réquisition par l’État des logements inoccupés, ainsi qu’un encadrement des loyers » . Au niveau des candidats à la présidentielle, seul Jean-Luc Mélenchon « a repris cette proposition » , souligne le militant associatif, qui pointe du doigt la « timidité des prétendants à l’Elysée » . A cet effet, le Dal a lancé, aux côtés de 25 associations et syndicats, un appel à la marche contre les expulsions locatives. La mobilisation se déroulera samedi prochain dans 20 villes de l’Hexagone.

L’application effective de la loi Dalo est aussi au cœur des revendications. Le non-respect de ce texte, qui impose, en théorie, à l’État de trouver un logement ou un hébergement aux personnes qui en font la demande et qui sont reconnues comme prioritaires, fait débat.Xavier Emmanuelli, ex-président du Samu social, avait alerté le gouvernement en mars 2010 sur le fait que « ce droit n’est pas assumé partout, et notamment en Ile-de-France » . Des milliers de ménages désignés prioritaires pour un logement par les commissions de médiation ne reçoivent pas d’offres dans le délai légal. Ce chiffre ne cesserait de croître, faute d’une mobilisation effective de l’offre. Cette situation, avait souligné Xavier Emmanuelli, « n’est évidemment pas acceptable, et constitue, de ce fait, un déni du droit qui met en cause la crédibilité de la loi  ».

Société
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