L’ESS au cœur du projet présidentiel écolo

Le projet porté par Eva Joly est le seul à oser le « social et solidaire », à même de refonder notre modèle de développement économique.

Jean-Philippe Magnen  • 12 avril 2012 abonné·es

L’écologie politique n’est pas radicale seulement du point de vue environnemental. En matière économique, le programme porté par Eva Joly est le seul à oser le « social et solidaire ». Pour un autre développement, au nom d’autres valeurs, vers une autre société.
En cette période de crise – financière, économique, sociale et écologique –, en cette heure où il devient urgent de répondre à l’aspiration démocratique exprimée par nos concitoyens autrement que par le rejet de la différence et de la diversité, l’économie sociale et solidaire (ESS) est au cœur du changement de société que nous appelons de nos vœux.
L’ESS permet – concrètement, immédiatement et pour longtemps – de refonder une juste mesure de l’efficacité et de la richesse, contre le PIB et les ratios d’analyse financière qui ne prennent jamais en compte les indicateurs sociaux et environnementaux.

Face à la concurrence entre individus, entre entreprises, entre territoires et entre États, l’ESS choisit le développement et la solidarité. La solidarité entre générations, dans la perspective d’un développement durable. La solidarité entre territoires, et au sein des territoires, qu’il s’agisse des rapports entre Nord et Sud, ou entre espaces urbains et ruraux.

L’ESS réinterroge notre modèle de développement et pose avec pertinence la question de la « profitabilité » en conjuguant trois vocations : l’intérêt général, avec des activités à utilité sociale et collective ; l’insertion des personnes, dans une logique de solidarité ; et, enfin, l’objet marchand, mais en remettant à plat les notions de productivité et de rentabilité pour en discuter la finalité.

Et si Eva Joly n’est pas la seule à parler d’ESS, nous sommes en colère devant la pauvre imagination des programmes présidentiels qui l’instrumentalisent en mesurettes cantonnées au pansement social. Ces programmes rabotent de fait le potentiel recélé par cette autre approche de l’économie, humainement créative, socialement et même technologiquement innovante, créatrice d’emplois durables et non délocalisables.

Au contraire, nous proposons un plan national de développement de l’ESS qui la reconnaisse comme une économie à part entière. Nous élaborerons une loi-cadre qui, en plus du soutien à la création d’activités et d’emplois par les entreprises de l’ESS, s’appuiera sur trois mesures phares :

– la réforme du droit des entreprises pour obliger les actionnaires qui ferment un établissement à en favoriser la reprise prioritaire par les salariés, notamment en Scop ;

– la généralisation de fonds régionaux dédiés à l’ESS, pilotés par les conseils régionaux, couplée à l’étude économique et juridique pour la création de véritables banques régionales éthiques ;

– la labellisation et la reconnaissance de pôles territoriaux de coopération économique, alternatives aux pôles de compétitivité.
Quand la précarité touche sept millions de personnes en France, quand on consomme les ressources naturelles à un rythme tel qu’il faudrait trois planètes pour tenir la distance, il faut remettre en question les fondements mêmes de l’économie et réfléchir enfin aux façons de retrouver certains équilibres fondamentaux. C’est tout l’enjeu de l’économie sociale et solidaire.

Politique
Temps de lecture : 3 minutes

Pour aller plus loin…

« Développer toutes les mutineries contre la classe dominante »
Entretien 17 avril 2024 abonné·es

« Développer toutes les mutineries contre la classe dominante »

Peter Mertens, député et secrétaire général du Parti du travail de Belgique, publie Mutinerie. Il appelle à multiplier les mobilisations contre l’Europe néolibérale et austéritaire sur tout le Vieux Continent.
Par Olivier Doubre
« Les Écolos, c’est comme les pirates dans Astérix qui se sabordent eux-mêmes » 
Politique 12 avril 2024 abonné·es

« Les Écolos, c’est comme les pirates dans Astérix qui se sabordent eux-mêmes » 

À la peine dans les sondages pour les élections européennes, avec une campagne qui patine, le parti écologiste se déchire sur fond d’affaire Julien Bayou. La secrétaire nationale, Marine Tondelier, tente d’éteindre le démon de la division.
Par Nils Wilcke
« Il est presque sûr que des eurodéputés RN ont reçu de grosses sommes de la Russie »
Entretien 11 avril 2024 abonné·es

« Il est presque sûr que des eurodéputés RN ont reçu de grosses sommes de la Russie »

À deux mois des élections européennes, l’ONG internationale Avaaz part en campagne contre le parti de Jordan Bardella et Marine Le Pen dont les sulfureux liens internationaux sont inquiétants.
Par Michel Soudais
« La gauche de demain doit être soucieuse d’un rassemblement démocratique »
Entretien 10 avril 2024 libéré

« La gauche de demain doit être soucieuse d’un rassemblement démocratique »

Le professeur de science politique Philippe Marlière est coauteur d’un court ouvrage étrillant la classe politique française et interpellant six personnalités (dont Hollande, Macron, Mélenchon). Pour lui, la gauche doit se repenser si elle souhaite devenir majoritaire.
Par Lucas Sarafian