Schiste : l’ambiguïté permanente

Le 14 juillet, François Hollande a tenu à écarter toute exploration. Mais le feuilleton n’est pas pour autant terminé.

Thierry Brun  • 18 juillet 2013 abonné·es

François Hollande a-t-il mis fin aux interrogations sur l’exploitation – ou non – des gaz de schiste ? Le chef de l’État a recadré le gouvernement et affirmé, lors de la traditionnelle intervention télévisée du 14 juillet, qu’il « n’y aura pas d’exploration de gaz de schiste » tant qu’il sera président. Cette déclaration a été saluée par les défenseurs de l’environnement, notamment Greenpeace : « Nous sommes satisfaits qu’il ferme la porte à l’exploration et à l’exploitation du gaz de schiste, quelle que soit la technique d’extraction », a déclaré Anne Valette, chargée de la campagne climat.

La déclaration présidentielle, destinée à rassurer les écologistes, veut aussi tirer un trait sur les polémiques de ces dernières semaines, notamment l’épisode du limogeage de Delphine Batho. L’ex-ministre a demandé à Jean-Marc Ayrault de « lever l’ambiguïté permanente » du gouvernement sur les gaz de schiste, après les déclarations d’Arnaud Montebourg. Le ministre du Redressement productif s’est en effet dit certain « qu’on arrivera, avec la technique, dans très peu de temps, au gaz de schiste écologique  », lors de son audition par la commission des Affaires économiques de l’Assemblée nationale, le 9 juillet. Ajoutant au passage : « Nous pouvons convaincre les écologistes raisonnables… Ils sont tous raisonnables. » Arnaud Montebourg, qui n’a pas été démis de ses fonctions par le Premier ministre, n’est pas le seul à pousser loin les feux en faveur des gaz de schiste. Dès le lendemain de la prestation présidentielle, le socialiste Pascal Lamy, directeur de l’Organisation mondiale du commerce pour encore quelques semaines, est intervenu sur France Inter et a relancé la polémique. « Les explorations de gaz de schiste aux États-Unis changent largement la donne du marché mondial dans les dix ans à venir. Et, ce qui est sûr, c’est qu’on a besoin, pour être compétitifs, d’une énergie pas trop chère et mieux maîtrisée », a dit le prétendant à un maroquin au gouvernement. De son côté, François Hollande n’est pas avare de contradictions. En septembre 2012, il annonçait l’annulation de plusieurs demandes de permis d’exploration des gaz de schiste, pour ensuite rappeler, deux mois plus tard, que la recherche de techniques de forage alternatives continuait et qu’il «  [prendrait] ses responsabilités » si une nouvelle technologie apparaissait. Depuis, plusieurs permis d’exploration sont restés en cours de validité en France.

Surtout, le chef de l’État ne s’est pas opposé aux négociations pour un accord de libre-échange entre l’Union européenne et les États-Unis. Lequel ouvre la porte à la mise en cause de réglementations empêchant la fracturation et l’exploitation des gaz de schiste, notamment la loi de 2011 interdisant la fracturation hydraulique en France. Jugée insuffisante par les écologistes et certains socialistes, cette loi est en outre menacée : le Conseil d’État a validé et transmis au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité déposée par le pétrolier texan Schuepbach pour la contester. On connaîtra, sans ambiguïté, son sort en novembre…

Écologie
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