Pascal Terrasse, symptôme de la droitisation sans fin du PS

Michel Soudais  • 29 novembre 2013 abonné·es

Illustration - Pascal Terrasse, symptôme de la droitisation sans fin du PS - Pascal Terrasse à Bourg-Saint-Andeol, le 16 novembre, en compagnie de Pierre Moscovici (Photo: CITIZENSIDE/CLAUDE PETITJEAN)

Le député socialiste de l’Ardèche Pascal Terrasse livrait hier dans Le Figaro un entretien particulièrement éclairant sur la fuite en avant dans laquelle est engagée la majeure partie des dirigeants socialistes. Son propos ? Le titre de cette interview, qui a fait la une du quotidien de Serge Dassault, le résume :

« Le temps de l’union nationale est venu en France »

On dirait du Bayrou, mais ce n’en est pas. Pascal Terrasse est le secrétaire national à la protection sociale du PS. Et, dans cet entretien, il explique que « l’austérité s’impose désormais à nous par des formes plus ou moins autoritaires » . Le mot étant négativement connoté, il suggère de « passer de l’austérité à la sobriété » . Jean-Marc Ayrault, qui a toujours dit qu’il ne serait jamais le Premier ministre de l’austérité, pourrait ainsi sans se dédire conduire une politique d’austérité rebaptisée « sobriété ». La sobriété, ça sonne écolo, c’est donc tout indiqué pour rendre l’austérité acceptable. Ce qui est le but de Pascal Terrasse, lequel affirme que la sobriété « n’a de sens que si elle est volontaire » . Comme la servitude.

Sur le chômage, « il est temps d’envisager des solutions nouvelles, comme celles qui ont permis à l’Allemagne de se redresser » , affirme Pascal Terrasse. Et le secrétaire national à la protection sociale du PS de vanter les « salaires plus modestes » de nos voisins d’Outre-Rhin. Avant d’invoquer un nouveau principe : la « discipline sociale » :

« Nous devons revoir notre système de redistribution depuis les prestations sociales jusqu’au contrat de travail encore trop rigide, et en particulier pour la jeunesse. »

Suppression des cotisations sociales durant deux ans pour les entreprises embauchant des jeunes, révision de notre système d’allocation chômage, travail obligatoire pour les bénéficiaires de minima sociaux « quelques heures par mois » … Les pistes suggérées par M. Terrasse semblent puisées dans la boîte à idées de l’UMP. Et ceux qui s’y opposeraient sont délégitimés comme étant « ceux qui, confortablement installés dans leurs emplois durables, refusent aux plus précaires une insertion sociale dans le monde de l’activité » .

**Pascal Terrasse veut des « citoyens responsables » qui acceptent les efforts : *« Aujourd’hui, nous sommes faibles car incapables de demander le moindre effort, laissant le soin aux générations futures de régler nos problèmes. » D’où la nécessité de « l’union nationale » .

Dérive d’un électron libre? On aimerait le croire. En octobre 2011, Pascal Terrasse avait déjà fait parler de lui en envisageant de repousser l’âge légal de la retraite à 65 ans, lors d’un colloque d’un institut de recherche sur l’économie du vieillissement. Il était alors le conseiller retraites de François Hollande et ses propos cyniques, qui n’étaient pas destinés être « reproduits dans un journal » , avaient fait polémique en pleine primaire socialiste. Martine Aubry les avaient dénoncés, François Hollande les avaient désavoués. Chacun sait maintenant, la réforme des retraites étant définitivement votée, ce que valait ce démenti puisque l’âge effectif de départ à la retraite vient d’être repoussé à 66 ans au moins pour tous ceux qui sont nés après 1973.

Pascal Terrasse n’a donc rien d’un hurluberlu et son entretien au Figaro est à prendre au sérieux. À la fois comme un symptôme de la droitisation sans fin dans laquelle sont engagés les dirigeants du PS et comme l’annonce d’un scénario, l’union nationale, dont il se murmure qu’il pourrait être mis en œuvre au lendemain des européennes si le FN y réalise un score trop important. En juin prochain.

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