Le plan Kerry moribond

Le secrétaire d’État américain menace de renoncer à son « plan de paix ».

Denis Sieffert  • 10 avril 2014 abonné·es

On sait les Israéliens experts dans l’art de faire durer éternellement des négociations avec l’espoir qu’elles n’aboutiront jamais. C’est ainsi au moins depuis les accords d’Oslo de 1993. Instruits par l’histoire, les Palestiniens avaient accepté en juillet dernier l’ouverture d’un énième « processus de paix » sous l’égide des États-Unis, à condition qu’une date butoir soit fixée. Le secrétaire d’État John Kerry, grand artisan de ce nouveau plan, s’était engagé à rendre sa copie le 30 avril.

Or, voilà qu’à l’approche de l’échéance, les dirigeants israéliens exigent un report sine die. Devant le refus du président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, de tomber une nouvelle fois dans ce piège, Israël a décidé d’annuler la libération d’un contingent de prisonniers politiques. Une libération qui figurait pourtant dans l’accord du mois de juillet. Se sentant délié de ses engagements, Mahmoud Abbas a signé des demandes d’adhésion de la Palestine à quinze conventions et traités internationaux. Une démarche qui pourrait conduire Israël devant la Cour pénale internationale en raison de sa politique coloniale. Multipliant les représailles, le gouvernement israélien a menacé de suspendre l’autorisation accordée à l’opérateur palestinien de téléphonie mobile Wataniya de développer son réseau dans la bande de Gaza. Et Benyamin Nétanyahou s’est empressé de donner son feu vert à un projet de construction d’un musée archéologique à Jérusalem-Est, dans le quartier palestinien de Silwan, renforçant ainsi l’occupation israélienne.

Incapable d’exercer la moindre pression significative sur Israël, et plutôt enclin à renvoyer les deux parties dos à dos, John Kerry semble proche de jeter l’éponge. Le secrétaire d’État américain a indiqué le 4 avril qu’il allait évaluer la position américaine avec Barack Obama, mais que le temps dont dispose Washington avait « des limites ». De nouvelles rencontres entre Israéliens et Palestiniens devaient avoir lieu lundi dernier, mais l’espoir était mince. D’autant que le Premier ministre israélien a encore dans sa manche une autre condition qu’il peut ressortir à tout instant et qu’il sait inacceptable : exiger des Palestiniens qu’ils reconnaissent la nature juive d’un État hébreu qui comprend 1 600 000 Arabes israéliens, musulmans et chrétiens. Bref, comme le confiait le 4 avril un proche de Benyamin Nétanyahou à un journaliste israélien, « tout risque de paix est écarté ».

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