Juncker dit « non » à la Grèce et menace la France

« Il ne peut y avoir de choix démocratique contre les traités européens », affirme notamment le président de la Commission européenne.

Michel Soudais  • 29 janvier 2015 abonné·es
Juncker dit « non » à la Grèce et menace la France
© Photo: JOHN THYS / AFP

Intraitable. Dans un entretien au Figaro (29 janvier, édition abonnés), le président de la Commission européenne adresse une fin de non-recevoir au gouvernement grec conduit par Alexis Tsipras. Sur l’annulation de la dette, Jean-Claude Juncker oppose à la Grèce un « non » catégorique : « Athènes a accepté deux plans d’ajustement (de redressement, NDLR), elle doit s’y sentir tenue. Il n’est pas question de supprimer la dette grecque. Les autres pays européens ne l’accepteront pas. »
On a connu le président de la Commission plus conciliant quand, Premier ministre du Luxembourg, il autorisait des dizaines de multinationales à s’affranchir des législations fiscales des pays membres de l’UE.
Lire > Juncker au centre d’un scandale fiscal impliquant 340 multinationales

Les élections ne changent rien, affirme en substance le président de la Commission européenne. Sans prendre beaucoup de gants :
« Dire qu’un monde nouveau a vu le jour après le scrutin de dimanche n’est pas vrai. Nous respectons le suffrage universel en Grèce, mais la Grèce doit aussi respecter les autres, les opinions publiques et les parlementaires du reste de l’Europe. Des arrangements sont possibles, mais ils n’altèreront pas fondamentalement ce qui est en place. »
Vous n’êtes pas certain d’avoir compris ? « Dire que tout va changer parce qu’il y a un nouveau gouvernement à Athènes, c’est prendre ses désirs pour des réalités » , ajoute encore Jean-Claude Juncker, qui lâche une phrase terrible, qui résume toutes les limites de la démocratie dans l’Union européenne :
« Il ne peut y avoir de choix démocratique contre les traités européens. »

Interrogé sur la France , et notamment sur la question de savoir si la Commission va accepter d’accorder à notre pays un délai supplémentaire pour réduire le déficit à 3 % du PIB, Jean-Claude Juncker se montre également rigide et menaçant.
Rigide quand il radote le credo de toutes les Commissions : « Nous voudrions voir la France renforcer ses réformes, en nombre comme en intensité. » Selon lui, « la France soufre d’un manque de réformes dites structurelles, de réformes qui portent sur l’essentiel (…). Elle doit soigneusement examiner les faiblesses de son droit du travail. »
Menaçant lorsqu’il réaffirme qu’ « il n’y a pas d’autre remèdes que de la consolidation budgétaire » (sic) et n’exclut pas de sanctionner la France si son déficit n’est pas réduit : « Un pays ne peut pas échapper aux sanctions s’il ne respecte pas les règles. »

Il n’y a pas de « diktat » allemand , affirme le président de la Commission européenne. « Cette impression d’un diktat, d’une machine allemande qui laminerait toute contradiction est parfaitement erronée » , soutient-il. Avant de lever un coin du voile de secret qui entoure les sommets européens :
« D’autres gouvernement, parfois même socialistes, étaient beaucoup plus sévères à l’égard de la Grèce, par exemple. »
Une confidence dont la véracité ne nous paraît pas contestable. Allez savoir pourquoi…

Monde
Temps de lecture : 3 minutes

Pour aller plus loin…

En Louisiane, Trump révise la mémoire de l’esclavage
Reportage 16 juillet 2025 abonné·es

En Louisiane, Trump révise la mémoire de l’esclavage

Depuis son retour à la Maison Blanche, le président des États-Unis mène une offensive contre les institutions culturelles engagées dans la transmission de la mémoire de l’esclavage. Reportage en périphérie de la Nouvelle-Orléans.
Par Apolline Guillerot-Malick
Droit international : quand règne la loi du plus fort
Monde 9 juillet 2025 abonné·es

Droit international : quand règne la loi du plus fort

Les principes du droit international restent inscrits dans les traités et les discours. Mais partout dans le monde, ils s’amenuisent face aux logiques de puissance, d’occupation et d’abandon.
Par Maxime Sirvins
Le droit international, outil de progrès ou de domination : des règles à double face
Histoire 9 juillet 2025 abonné·es

Le droit international, outil de progrès ou de domination : des règles à double face

Depuis les traités de Westphalie, le droit international s’est construit comme un champ en apparence neutre et universel. Pourtant, son histoire est marquée par des dynamiques de pouvoir, d’exclusion et d’instrumentalisation politique. Derrière le vernis juridique, le droit international a trop souvent servi les intérêts des puissants.
Par Pierre Jacquemain
La déroute du droit international
Histoire 9 juillet 2025 abonné·es

La déroute du droit international

L’ensemble des normes et des règles qui régissent les relations entre les pays constitue un important référent pour les peuples. Mais cela n’a jamais été la garantie d’une justice irréprochable, ni autre chose qu’un rapport de force, à l’image du virage tyrannique des États-Unis.
Par Denis Sieffert