Le Sénat rétablit le délit de racolage passif

Retour du délit de racolage passif mais pas de pénalisation du client : les sénateurs mettent les filles en danger.

Ingrid Merckx  • 31 mars 2015 abonné·es
Le Sénat rétablit le délit de racolage passif
© Photo: BERTRAND LANGLOIS / AFP

Douze ans en arrière. Dans la nuit du 30 au 31 mars, lors de l’examen de la loi visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel, le Sénat a rétabli le délit de racolage passif instauré par Nicolas Sarkozy en 2003. Dans le même temps, il a rejeté la disposition prévoyant de pénaliser le client. Soit l’exact contraire de ce que proposait le texte.

Si la pénalisation divise féministes et associations de prévention, le retour du délit de racolage passif met tout le monde d’accord. Le Mouvement du nid (abolitionniste) dénonce un choix « réac, déshonorant et irresponsable » . Médecins du monde (opposé à la pénalisation) rappelle que ce délit a précarisé et criminalisé les personnes prostituées.

La ministre de la Santé a jugé le choix des sénateurs « invraisemblable et régressif », « incroyable et méprisant à l’égard des femmes » . 75 % des sénateurs sont des hommes, 75 % des personnes prostituées sont des femmes.

Le texte, adopté à 162 voix contre 42 (mais 125 abstentions), doit revenir devant l’Assemblée. La secrétaire d’État aux Droits des femmes, Pascale Boistard, dit vouloir réintroduire la pénalisation. Qu’en serait-il du délit de racolage passif ? En cas de désaccord avec le Sénat, les députés auraient le dernier mot.

Un autre amendement voté par les sénateurs permet le blocage administratif des «sites Internet favorisant la traite des êtres humains et le proxénétisme» . C’est une mesure similaire à celle qui prévoit le blocage des contenus concernés par la loi pour la confiance dans l’économie numérique ainsi que des sites faisant l’apologie du terrorisme. Problème, alerte la Quadrature du net qui a soumis aux députés des alternatives « plus efficaces et moins dangereuses » (via une plateforme de signalement) : elles autorisent le pouvoir administratif à se passer de celui d’un juge et à jouer le rôle de censeur. Aux députés de remettre de l’ordre ?

A LIRE : Prostitution la loi est-elle la solution ?

Pour aller plus loin…

À Nantes, la socio-esthétique apaise les corps des demandeurs d’asile
Reportage 2 décembre 2025 abonné·es

À Nantes, la socio-esthétique apaise les corps des demandeurs d’asile

Bulle de douceur, le travail de la socio-esthéticienne du centre d’accueil des demandeurs d’asile complète l’approche des travailleuses sociales en redonnant au corps la place centrale qu’il mérite, et à la personne, un temps pour soi.
Par Elsa Gambin
29 novembre : en France, une unité nationale inédite mais tardive de solidarité avec la Palestine
Mobilisation 28 novembre 2025

29 novembre : en France, une unité nationale inédite mais tardive de solidarité avec la Palestine

Ce samedi de Journée internationale de solidarité avec le peuple palestinien, une manifestation nationale rassemblera à Paris plus de 85 organisations : associations, syndicats et l’ensemble des partis de gauche. Une configuration inédite depuis le 7 octobre 2023, la plupart des structures politiques restant jusqu’ici en retrait ou divisées lors des mobilisations. Des rassemblements ont aussi lieu sur tout le territoire.
Par Caroline Baude
Dissolution d’Urgence Palestine : face aux rapporteurs spéciaux de l’ONU, la France botte en touche
Répression 28 novembre 2025

Dissolution d’Urgence Palestine : face aux rapporteurs spéciaux de l’ONU, la France botte en touche

Fin septembre, le gouvernement français a été interpellé par quatre rapporteurs spéciaux de l’ONU sur les atteintes aux droits humains qu’entraînerait la dissolution d’Urgence Palestine. Politis a pu consulter la réponse du gouvernement, qui évacue les questions, arguant que la procédure est toujours en cours.
Par Pauline Migevant
« Je ne veux pas être déportée » : au CRA d’Oissel, la mécanique de l’enfermement
Reportage 27 novembre 2025 abonné·es

« Je ne veux pas être déportée » : au CRA d’Oissel, la mécanique de l’enfermement

Si le centre de rétention administrative (CRA) d’Oissel-sur-Seine, situé en pleine forêt, n’existe pas dans la tête des gens habitant aux alentours, l’enfermement mental et physique est total pour les femmes et les hommes qui y sont retenus. Politis a pu y rentrer et recueillir leurs témoignages.
Par Pauline Migevant