Renseignement : De nouveaux moyens pour pister des internautes

Lena Bjurström  • 17 mars 2015 abonné·es
Renseignement : De nouveaux moyens pour pister des internautes
© Photo : ABO / Science Photo Library

Accès en temps réel aux données informatiques d’internautes, détection des comportements «suspects» en ligne… Un nouveau projet de loi augmente largement l’accès des services de renseignement aux données personnelles des internautes. Ceci, «pour les seuls besoins de la prévention du terrorisme» , précise le texte que Le Monde et Le Figaro se sont procurés avant sa présentation devant le conseil des ministres jeudi.

Entre autres mesures, les services de renseignement auraient notamment accès en temps réel à certaines données informatiques, comme les conversations privées sur Skype, Facebook, Twitter.

Le Premier ministre pourrait désormais exiger les entreprises gérant réseaux sociaux et moteurs de recherche à «détecter, par un traitement automatique, une succession suspecte de données de connexion» et à signaler toute dérive aux services, précise Le Monde .

Par ailleurs, le projet de loi étendrait à cinq ans l’obligation pour les entreprises numériques de conserver systématiquement les données de tous leurs utilisateurs, contre un an actuellement. Une mesure qui pourrait bien être condamnée au niveau européen. Au printemps 2014, la Cour de Justice de l’Union Européenne avait ainsi invalidé une directive de 2006 imposant le stockage de données de 6 mois à 2 ans.

Autant de mesures qui ne feraient que rendre légales des pratiques déjà existantes, selon Adrienne Charmet de l’association de défense des libertés numériques La Quadrature du Net.

«C’est un grand classique de ce genre de projets de loi. Les services de renseignement demandent une sécurisation juridique de ce qu’ils font déjà. Donc on intègre ces pratiques dans une nouvelle loi, et ainsi de suite» , explique-t-elle.

Le texte lui-même précise qu’il s’agit d’ «offrir un cadre légal général à des activités susceptibles de porter atteinte à la vie privée et au secret des correspondances» , rapporte Le Figaro .

Pour contrebalancer cette augmentation des pouvoirs du renseignement, le gouvernement compte créer une nouvelle instance de contrôle indépendante : la commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR), composée de parlementaires, hauts magistrats, épaulée par une équipe d’experts. Cette commission devrait exercer un contrôle des moyens engagés. Mais le texte prévoit la possibilité d’exercer une surveillance sans son accord : «en cas d’urgence liée à une menace imminente ou à un risque très élevé de ne pouvoir effectuer l’opération ultérieurement, le dispositif peut être mis en œuvre immédiatement»


Retrouvez dans les kiosques jeudi notre dossier Tous surveillés ? sur les données personnelles sur Internet.

«C’est l’envers du décor. Nous n’avons jamais été si connectés, nous n’avons jamais eu autant de possibilités de s’informer, d’échanger, de partager tout autour du monde. Mais ce faisant, nous n’avons jamais autant renseigné sur nous-mêmes, volontairement ou « à l’insu de notre plein gré ». En devenant un élément presque inévitable de notre vie quotidienne, Internet interroge les limites de nos vies privées. Il est urgent de s’interroger : A qui profitent nos données ?»

Société
Temps de lecture : 3 minutes

Pour aller plus loin…

Grève du 1er octobre : une mobilisation « pour imposer un rapport de force »
Luttes 2 octobre 2024 abonné·es

Grève du 1er octobre : une mobilisation « pour imposer un rapport de force »

À l’appel de trois organisations syndicales (CGT, Solidaires, FSU), plus de 180 cortèges ont défilé dans toute la France mardi 1er octobre, jour du discours de politique générale prononcé par Michel Barnier. 170 000 personnes ont défilé selon la CGT.
Par Thomas Lefèvre
Deux salariées obligées de retirer leur voile : les conséquences de l’islamophobe loi « séparatisme »
Discriminations 1 octobre 2024 abonné·es

Deux salariées obligées de retirer leur voile : les conséquences de l’islamophobe loi « séparatisme »

À Nancy, deux employées d’une association de réinsertion se sont vu demander de retirer leur voile sous peine de licenciement. Des salariés, eux, se mobilisent et un rassemblement est prévu ce 2 octobre.
Par Pierre Jequier-Zalc
Fraude sociale : un rapport bat en brèche des années de discours stigmatisants
Social 26 septembre 2024 libéré

Fraude sociale : un rapport bat en brèche des années de discours stigmatisants

Le Haut conseil du financement de la protection sociale (HCFIPS) a publié son rapport sur la fraude sociale. Ses nombreuses conclusions mettent à mal le mythe des assurés profiteurs du système et la culture du « tout-contrôle ».
Par Pierre Jequier-Zalc
La Macronie s’oppose bien timidement à l’offensive de Retailleau sur l’AME
Santé 26 septembre 2024 abonné·es

La Macronie s’oppose bien timidement à l’offensive de Retailleau sur l’AME

Le nouveau ministre de l’Intérieur plaide pour la suppression de ce dispositif de soins pour les étrangers. Les quelques figures macronistes qui s’y s’opposent publiquement peinent à cacher la relative docilité du camp présidentiel.
Par Lucas Sarafian