Italie : Sévère avertissement pour Renzi

Avec cinq régions sur sept, le pâle Parti démocrate remporte une victoire électorale en trompe-l’œil.

Olivier Doubre  • 3 juin 2015 abonné·es
Italie : Sévère avertissement pour Renzi
© Photo : AFP PHOTO / PIERRE TEYSSOT

L’Italie fut longtemps un pays où l’abstention était extrêmement faible, la mémoire de la dictature fasciste expliquant cet attachement au vote depuis 1945. Depuis une quinzaine d’années pourtant, la participation diminue régulièrement, signe du fossé croissant entre la classe politique et les électeurs. Mais jamais scrutin n’avait recueilli aussi peu d’adhésion que ces élections régionales et communales partielles du 31 mai, où près d’un électeur sur deux ne s’est pas déplacé.

Les résultats bruts – cinq régions remportées sur sept – donnent une nette victoire au Parti démocrate (PD, centre-gauche), et sont apparus a priori comme un succès pour Matteo Renzi, le très social-libéral Président du conseil. En fait, le Parti démocrate a perdu près de deux millions de voix par rapport aux élections européennes, dernier scrutin en date. Surtout, dans ses bastions du Centre, appelées « régions rouges » au temps du PCI, Toscane et Ombrie, l’abstention atteint des niveaux inédits et les candidats reconduits sont, au sein du PD, particulièrement éloignés du courant de Matteo Renzi. De même, en Campanie (seule Région reprise à la droite) et dans les Pouilles, les élus, respectivement le maire de Salerne, ancré à gauche, et celui de Bari, ancien magistrat anti-corruption, sont des personnalités tout à fait atypiques au sein du parti. Enfin, en Ligurie, la candidate soutenue par le Président du Conseil, qui avait battu aux primaires l’ancien dirigeant de la CGIL (équivalent de la CGT), Sergio Cofferatti, qui l’a accusée de fraude et a présenté une liste dissidente sur sa gauche, est battue largement par un berlusconien, considéré pourtant de faible envergure dans son propre camp. À droite, Forza Italia semble poursuivre sa déconfiture, incapable d’emmener une succession au Cavaliere vieillissant, et c’est la Ligue du Nord qui gagne, seule, à la majorité absolue (et avec une liste dissidente qui recueille pas moins de 15 % des voix), la Vénétie. Ce parti, en passe de devenir hégémonique à droite, s’est allié à des néofascistes affirmés et se veut désormais un parti national, non plus autonomiste, mais anti-immigrés, anti-Roms et anti-européen.

En somme, avec 26 % des voix (contre 41 % quand Renzi est arrivé au pouvoir), le PD doit s’inquiéter à la fois de la recomposition actuelle de la droite et de ses divisions internes, surtout la gauche du parti, qui supporte de moins en moins la politique libérale menée sans état d’âme par le Président du Conseil.

Monde
Temps de lecture : 2 minutes

Pour aller plus loin…

Droit international : quand règne la loi du plus fort
Monde 9 juillet 2025 abonné·es

Droit international : quand règne la loi du plus fort

Les principes du droit international restent inscrits dans les traités et les discours. Mais partout dans le monde, ils s’amenuisent face aux logiques de puissance, d’occupation et d’abandon.
Par Maxime Sirvins
Le droit international, outil de progrès ou de domination : des règles à double face
Histoire 9 juillet 2025 abonné·es

Le droit international, outil de progrès ou de domination : des règles à double face

Depuis les traités de Westphalie, le droit international s’est construit comme un champ en apparence neutre et universel. Pourtant, son histoire est marquée par des dynamiques de pouvoir, d’exclusion et d’instrumentalisation politique. Derrière le vernis juridique, le droit international a trop souvent servi les intérêts des puissants.
Par Pierre Jacquemain
La déroute du droit international
Histoire 9 juillet 2025 abonné·es

La déroute du droit international

L’ensemble des normes et des règles qui régissent les relations entre les pays constitue un important référent pour les peuples. Mais cela n’a jamais été la garantie d’une justice irréprochable, ni autre chose qu’un rapport de force, à l’image du virage tyrannique des États-Unis.
Par Denis Sieffert
Yassin al-Haj Saleh : « Le régime syrien est tombé, mais notre révolution n’a pas triomphé »
Entretien 2 juillet 2025 abonné·es

Yassin al-Haj Saleh : « Le régime syrien est tombé, mais notre révolution n’a pas triomphé »

L’intellectuel syrien est une figure de l’opposition au régime des Assad. Il a passé seize ans en prison sous Hafez Al-Assad et a pris part à la révolution en 2011. Il dresse un portrait sans concession des nouveaux hommes forts du gouvernement syrien et esquisse des pistes pour la Syrie de demain.
Par Hugo Lautissier