Notre-Dame-des-Landes : « On est devenus squatteurs chez nous ! »
Le tribunal a tranché, les paysans installés sur la ZAD peuvent être expulsés à tout moment. Choc, colère et détermination.
dans l’hebdo N° 1389 Acheter ce numéro
Scène boulevardière, chez Denise et Joël Bizeul. « Bonjour, je suis la recenseuse, vous avez rempli les formulaires ? » Non, ils ont d’autres chats à fouetter en ce samedi pluvieux. Mercredi 27 janvier, un huissier leur a notifié, chèque d’indemnisation à la main, l’expulsion immédiate de leur exploitation, à La Rochette. Elle empiète sur le périmètre retenu pour la construction, à Notre-Dame-des-Landes (Loire-Atlantique), d’un vaste aéroport sur 2 000 hectares qui cristallise une très importante contestation depuis près de dix ans. L’agente fait son travail. « Vous habitiez ici l’an dernier ? » « Oui, et même depuis toujours… » « Emploi à plein temps ? » « Bien plus… Mais je ne sais pas jusqu’à quand. » Il a averti, faussement enjoué, la petite entreprise qui vient relever son tank : « Attention, désormais vous achetez du lait illégal ! »
Au total, l’huissier a visité les quatre fermes et les onze habitations encore occupées par des habitants « historiques » sur la « zone à défendre » (ZAD), comme l’ont rebaptisée les opposants. Il a été éconduit partout, comme depuis le lancement de la procédure d’expropriation lancée il y a quatre ans par Ago Vinci, le concessionnaire du projet d’aéroport. « On ne s’est pas emmerdé à résister toutes ces années pour lâcher maintenant ! », peste Joël Bizeul. L’éleveur, qui vit en marge à l’est de la ZAD, assume sa discrétion au sein du mouvement de résistance. Pas de macaron « Non à l’aéroport » sur sa voiture. « En vacances, on s’applique à ne pas dire d’où l’on vient, indique Denise. Parce que tout le monde connaît Notre-Dame-des-Landes en France, et qu’on finit par ne plus parler que de ça. »
La peau