Des « avancées » contre les libertés

La loi sur la réforme pénale sied à l’opposition.

Christophe Kantcheff  • 9 mars 2016
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Des « avancées » contre les libertés
© Photo : ERICK GARIN / CITIZENSIDE / AFP

Il n’y a pas que le projet El Khomri qui sied à l’opposition. De la loi sur la réforme pénale, votée à l’Assemblée en première lecture mardi, voici ce que dit Éric Ciotti : « Le texte me va bien, on a obtenu des avancées importantes. » De la part d’un gars qui a donné comme titre gouleyant Autorité à son dernier livre, c’est rassurant, non ? De ce côté de l’hémicycle, le nouveau ministre de la Justice, Jean-Jacques Urvoas, est très apprécié. Les Républicains (LR) se félicitent qu’il y ait eu « beaucoup de concertation en amont ». Après le départ de Christiane Taubira, le temps des gens bien élevés est revenu…

Notre bon gouvernement, qui se dit apte à faire face aux attaques terroristes, n’a pas su résister aux pressions autrement plus redoutables de l’opposition. Du coup, le texte de la loi sort de l’Assemblée nationale plus menaçant encore vis-à-vis des libertés publiques qu’il n’y est entré. Outre que les policiers et gendarmes pourront désormais tirer en cas « d’absolue nécessité » (l’homme qui tua Liberty Valance ne se justifiait pas autrement), que les pouvoirs des préfets seront renforcés en matière de police préventive ainsi que ceux des procureurs dans les enquêtes, plusieurs amendements LR ont été adoptés : une peine incompressible de trente ans, la condamnation des constructeurs de smartphones qui refuseraient de coopérer avec la justice… Champagne pour Ciotti !

Reste un amendement auquel le gouvernement a courageusement barré la route. L’assaut est venu des rangs du Parti socialiste, de la part d’un traître à la patrie, le député de Seine-Saint-Denis, Mathieu Hanotin. Son but : obtenir la délivrance de récépissés lors de vérifications d’identité pour lutter contre les contrôles au faciès. Des esprits dérangés ont pris cette promesse du candidat Hollande au sérieux, les malheureux. Ils prétendent que les contrôles au faciès sont monnaie courante. « Une réalité marginale », a répliqué Bernard Cazeneuve. Le ministre de l’Intérieur a même réalisé cette prouesse de s’appuyer sur le rapport du collectif Stop le contrôle au faciès, dont les conclusions pourtant démentent ses dires, pour rejeter l’amendement d’un revers de la main. Le danger terroriste était glorieusement repoussé. Ainsi que l’esprit de responsabilité, par la même occasion.

Culture
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