Intoxication aux pesticides : deux anciens salariés d’une coopérative agricole indemnisés

Chloé Dubois (collectif Focus)  • 22 septembre 2016
Partager :
Intoxication aux pesticides : deux anciens salariés d’une coopérative agricole indemnisés
© Photo : PATRICK PLEUL / ZB / DPA

Pour la première fois, un tribunal a ordonné l’indemnisation de deux anciens salariés de la coopérative agricole Triskalia, intoxiqués aux pesticides sur leur lieu de travail. Au total, six anciens travailleurs ayant contracté de graves maladies, disent avoir été victimes d’une telle exposition et accusent le géant de l’agroalimentaire de les avoir laissé au contact de produits nocifs.

En septembre 2014, le tribunal des affaires de sécurité sociale (Tass) avait déjà reconnu coupable le groupe agricole de « faute inexcusable ». Ce jeudi, il a finalement ordonné que Laurent Guillou et Stéphane Rouxel soient indemnisés de plus de 100 000 euros en raison du préjudice subi. D’après le communiqué de l’Union syndicale Solidaires, « c’est la première fois en France qu’un tribunal indemnise de ce montant des salariés victimes des pesticides ».

Peu de temps après les faits, survenus entre 2009 et 2010, Stéphane Rouxel et Laurent Guillou ont développé une hypersensibilité aux produits chimiques puis ont été licenciés. De son côté, le géant breton s’était contenté de nier toute responsabilité dans l’apparition de la maladie, refusant alors d’octroyer une compensation aux deux hommes. Les salariés avaient alors déposé plainte dans l’intention de faire reconnaître la pathologie comme un accident du travail.

À lire >> Intoxiqués aux pesticides

Une victoire pour les deux anciens qui « mènent depuis près de sept ans un combat sans relâche pour faire reconnaître leur maladie, exiger réparation et dénoncer le scandale sanitaire et environnemental que représente l’utilisation massive et irresponsable des pesticides dans l’industrie agroalimentaire », précise le communiqué.

Laurent Guillou et Stéphane Rouxel se sont portés partie civile auprès du tribunal de grande instance de Saint-Brieuc, dans le cadre de la plainte au pénal qu’ils ont déposée en 2010 après leur deuxième accident du travail et leur intoxication et attendent que le tribunal des prud’hommes de Lorient statue sur leurs licenciements.

À leurs côtés, l’Union syndicale Solidaires et de nombreuses organisations ou associations de soutiens aux victimes de pesticides ont également participé à ce combat, loin d’être terminé d’après le communiqué :

Par ailleurs, les autres salariés attendent toujours réparations et une audience aux prud’hommes, estimant être victimes de « licenciement abusif ». Parmi eux, Raymond Pouliquen, atteint d’une leucémie, et Noël, son fils, atteint d’un lymphome. Tout deux sont d’anciens salariés de Triskalia sur le site installé à Glomel.

À lire >> Perturbateurs endocriniens : À quand une réglementation ?

Sur 10 salariés principalement affectés au stockage des produits phytosanitaires, dont neuf présents en 1992 à Glomel : 5 sont décédés avant 70 ans (dont 4 d’une pathologie cancéreuse), 4 sont gravement malades d’une pathologie cancéreuse, et un est atteint d’une maladie chronique.

Le 9 septembre, une conférence de presse destinée à alerter sur ce scandale sanitaire, social et environnemental présentait d’ailleurs le cas de ces deux hommes, eux aussi intoxiqués sur leur lieu de travail. D’après un compte rendu accessible via le site Générations Futures, ces personnes malades ne seraient malheureusement pas des cas isolés :

Santé Écologie
Temps de lecture : 3 minutes
Soutenez Politis, faites un don.

Chaque jour, Politis donne une voix à celles et ceux qui ne l’ont pas, pour favoriser des prises de conscience politiques et le débat d’idées, par ses enquêtes, reportages et analyses. Parce que chez Politis, on pense que l’émancipation de chacun·e et la vitalité de notre démocratie dépendent (aussi) d’une information libre et indépendante.

Faire Un Don

Pour aller plus loin…

VivaTech : le salon des start-ups écocides
Reportage 13 juin 2025 abonné·es

VivaTech : le salon des start-ups écocides

Paris accueille Viva Technology, le plus grand salon européen dédié au secteur de la tech et aux start-ups. Dans ce temple de la sacro-sainte innovation, l’écologie est l’éternelle absente, cantonnée à de néfastes inventions technosolutionnistes.
Par Thomas Lefèvre
François Sarano : « Il y a une vraie lueur d’espoir pour les océans si on s’en donne les moyens »
Entretien 9 juin 2025 abonné·es

François Sarano : « Il y a une vraie lueur d’espoir pour les océans si on s’en donne les moyens »

L’océanographe et plongeur professionnel ne se lasse pas de raconter les écosystèmes marins qu’il a côtoyés dans les années 1980 et qu’il a vu se dégrader au fil des années. Il plaide pour une reconnaissance des droits des espèces invisibles qui façonnent l’équilibre du monde, alors que s’ouvre ce 9 juin à Nice la Conférence des Nations unies sur l’océan (Unoc).
Par Vanina Delmas
Surpêche : en France, les stocks s’épuisent, la pêche industrielle s’accroche
Infographie 9 juin 2025 abonné·es

Surpêche : en France, les stocks s’épuisent, la pêche industrielle s’accroche

Alors que les ressources marines françaises s’épuisent, la pêche industrielle poursuit son activité à un rythme soutenu. Sous la surface, les fonds marins français sont méthodiquement ravagés par des techniques de pêche industrielles lourdes et peu sélectives.
Par Maxime Sirvins
Les pêcheurs de la baie de Granville en eaux troubles
Reportage 9 juin 2025 abonné·es

Les pêcheurs de la baie de Granville en eaux troubles

Biodiversité, tourisme, pêche, conchyliculture… la zone maritime au large de Granville et de Chausey concentre à elle seule beaucoup des problématiques qui seront à l’ordre du jour de la Conférence des Nations unies  sur l’océan (Unoc) qui s’ouvre à Nice ce 9 juin.
Par Guy Pichard