À Compiègne, François Fillon a bien du mal à remonter la pente

Empêtré dans ses affaires d’emplois familiaux, le candidat de la droite organisait mercredi soir un meeting sur le thème de la sécurité pour tenter de fédérer son noyau électoral.

Nadia Sweeny  • 16 février 2017 abonné·es
À Compiègne, François Fillon a bien du mal à remonter la pente
© Photo : FRANCOIS NASCIMBENI / AFP

Le déplacement n’est pas audacieux, mais il a l’avantage de réunir les fidèles, pour tenter de faire corps. C’est donc à Compiègne, dans l’Oise, une ville et un département tenus par les Républicains, dans la région des Hauts-de-France, présidée par Xavier Bertrand, que François Fillon s’est déplacé, pour aborder le thème de la sécurité.

Si le candidat a affirmé, autour d’une table ronde, la nécessité d’armer les polices municipales et de leur donner le droit de faire des contrôles d’identités, il a surtout annoncé vouloir abaisser l’âge de la majorité pénale à 16 ans. Un clin d’œil au programme de Nicolas Sarkozy, rencontré plus tôt dans la journée à l’occasion d’un déjeuner faisant office d’appel au secours.

Le candidat Fillon n’arrive décidément pas à se dépêtrer des conséquences désastreuses de l’affaire des emplois présumés fictifs de son épouse, Penelope. D’autant que Le Canard a enfoncé le clou Fillon en y ajoutant, ce mercredi, les marasmes fiscaux de son porte-parole, Thierry Solère.

C’est donc vers 19 heures qu’on a pu voir l’étendu des dégâts. Le candidat tenait meeting dans une salle de spectacle nommée Le Tigre. Bien choisie : elle permettait, par sa situation géographique et la présence de nombreux parkings grillagés, de tenir les trublions à l’écart du candidat. Le désormais habituel comité d’accueil était présent, drapeaux du Parti de gauche et de la CGT flottant au vent, casseroles et pancartes en main : « Fillon en prison », « Nous aussi on veut être payés à ne rien foutre », hurlait la quarantaine de citoyens, freinant l’entrée des voitures.

« Et après, on va nous dire qu’il n’y a personne, fustige Bertrand, filloniste du coin. C’est à cause d’eux : ce sont des professionnels de la manifestation : des syndiqués qui ne foutent rien ! » Même longtemps après le départ des bateleurs de casseroles, ça ne rugissait pas loin dans la salle du Tigre. Quelque 400 personnes étaient présentes. Les jeunes fillonistes, sur l’aile droite, tentaient de donner de la voix aux propos enflammés d’une Caroline Cayeux, sénatrice-maire de Beauvais, d’un Éric Woerth ou d’un Xavier Bertrand qui hurlaient à la « machination diabolique », « l’épreuve injuste », en affirmant qu’« ils ont échoué ! »

Force est de constater que non. « Ils » (on ne sait pas précisément qui) n’ont pas vraiment échoué. Oui, la pugnacité de l’homme qui s’accroche force l’admiration des convives, mais ils restent mitigés entre le respect, la pitié et le désespoir.

« Ça a fragilisé mon opinion », avoue Jean-Luc à propos des révélations du Canard. Sa compagne Chantal s’est sentie « consternée » : « Je ne pensais pas que c’était possible… mais qui choisir d’autre ? » se demande-t-elle. Alors finalement, après réflexion elle reconnaît avoir « dépassé ça » : « Je me dis que ce n’est pas pour l’homme que je vote, mais pour le programme. Tout le monde peut faire des erreurs. » Un pardon sous forme de non-choix qui rendent les silences pesants au moment où François Fillon évoque « les délinquants » ou l’intransigeance dont doit faire preuve la justice.

« Je supprimerai le système des remises et des aménagements quasi automatiques des peines de prison, pour que la sanction retrouve sa force », a-t-il clamé, droit dans ses bottes. Claude Guéant, condamné à un an de prison ferme aménageable suite à une loi loi votée en 2009 sous Nicolas Sarkozy, appréciera.

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