L’affaire Macron

Il n’est plus question ici d’une simple affaire Benalla.

Sébastien Fontenelle  • 25 juillet 2018 abonné·es
L’affaire Macron
© photo : BENJAMIN CREMEL / AFP

Un dévoué journaliste du service politique du Figaro affirme ce matin, après l’audition de Gérard Collomb par la commission d’enquête parlementaire en charge de ce gigantesque scandale – dont Jean-Luc Mélenchon souligne qu’il « sent le Watergate » –, que « la crise Benalla (1) » « est » désormais « circonscrite ».

Ce serviable professionnel veut évidemment suggérer, par le choix de cet adjectif, lesté ici du sens que lui donnent par exemple les pompiers lorsqu’ils réussissent à contenir un incendie, que cette ahurissante affaire (2) serait désormais sous contrôle (de l’Élysée et de ses ministères d’accompagnement).

Cela est faux, évidemment. Mais pour autant, et si l’on s’en tient à la stricte définition de ce mot, l’affaire Benalla est bel et bien étroitement circonscrite – dans le tout petit périmètre où se dresse, au numéro 55 de la rue du Faubourg Saint-Honoré (75008, Paris), la présidence de la République.

L’une des leçons de l’audition susmentionnée de M. Collomb – comme de celle, quelques heures plus tard, du préfet de police de Paris – est en effet que c’est « à l’Élysée » que la décision aurait dû être immédiatement prise de sanctionner les exactions d’Alexandre Benalla – plutôt que de lui octroyer, en même temps que lui était paraît-il notifiée une suspension de quinze jours (et en complément de son potelé salaire, de son véhicule de fonction gyropharé et de quelques autres avantages minuscules, comme – selon Le Point – une habilitation « au titre du secret de la défense nationale »), un prestigieux logement de fonction (3).

Pour le dire autrement, il n’est plus question ici d’une affaire Benalla – mais d’une affaire Macron, dont l’extrême gravité justifierait peut-être que quelqu’un·e, quelque part, se rappelle qu’en 2007 l’article 68 de la Constitution, qui stipulait naguère que le chef de l’État ne pouvait être démis que s’il s’était rendu coupable de « haute trahison », a été modifié : il prévoit aujourd’hui que le président de la République française peut être destitué « en cas de manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat ».

(P.-S. : Bonnes vacances, quand même.)

(1) Du nom, aujourd’hui connu mondialement, de ce très proche conseiller d’Emmanuel Macron déguisé en policier qui a, dans les rues de Paris, tranquillement agressé quelques manifestant·e·s le 1er mai 2018.

(2) Qui depuis ce matin fait proférer à d’éminent·e·s représentant·e·s du parti régimaire (comme Mme Bergé et M. Castaner), et en guise de contre-feux, de stupéfiantes contrevérités.

(3) Cette audition du ministre de l’Intérieur a également été l’occasion de vérifier qu’il entretenait avec la vérité un rapport un peu distendu – puisqu’il a, par exemple, d’abord déclaré qu’il n’avait « jamais parlé » d’Alexandre Benalla avec Emmanuel Macron, puis quelques minutes plus tard, et sans sourciller – comme s’il ne réalisait pas qu’il était en train de se couper –, qu’il avait parlé d’Alexandre Benalla avec Emmanuel Macron.

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De bonne humeur

Sébastien Fontenelle est un garçon plein d’entrain, adepte de la nuance et du compromis. Enfin ça, c’est les jours pairs.

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