Profite de la guerre…

La France du si pacifiste Emmanuel Macron a encore livré, en 2017, « pour plus d’1,7 milliard d’euros d’armements à l’Arabie saoudite ».

Sébastien Fontenelle  • 12 septembre 2018 abonné·es
Profite de la guerre…
© photo : Bandar Algaloud / Saudi Kingdom / ANADOLU AGENCY

Emmanuel Macron, président de la République française, est un homme de paix. Telle est du moins l’image qu’il semble vouloir projeter lorsqu’il confectionne – c’était le 30 août dernier – un tweet pour se féliciter de ce que « nous vivons depuis 70 ans dans un miracle : il n’y a plus la guerre en Europe (1) ». Mais, en réalité, Emmanuel Macron, président de la République française, est, dans ces matières, beaucoup plus ductile que ne le suggère cette aimable posture.

Par exemple, Emmanuel Macron ne peut pas ne pas savoir que l’abominable guerre qui ensanglante le Yémen depuis 2015 a déjà provoqué, selon Amnesty International, « l’une des plus grandes catastrophes humanitaires au monde (2) ». Emmanuel Macron ne peut pas non plus ignorer que la coalition emmenée par l’Arabie saoudite a commis là, selon l’ONU, d’épouvantables « crimes de guerre » et qu’elle a encore tué dans un raid, le 9 août dernier, quarante enfants – dont le massacre a bien sûr été présenté par Riyad, selon un procédé désormais coutumier, comme un regrettable « dommage collatéral ». Et, bien sûr, Emmanuel Macron sait parfaitement que, « comme tout conflit, celui-ci est alimenté par les ventes d’armes (3) », et que, par conséquent – il convient d’y insister un peu lourdement –, les pays qui vendent des armes aux Saoudiens et à leurs acolytes portent une part de responsabilité dans la continuation de cette – très – sale guerre et dans la perpétration des atrocités susmentionnées.

Or, l’un de ces pays est la France (4), qui depuis des années se fait une gloire de cet infâme commerce : le « socialiste » Manuel Valls, lorsqu’il était Premier ministre, le présentait déjà, selon sa manière déhontée, comme un combat « pour notre économie, nos emplois ». Et plus récemment Benjamin Griveaux (5), porte-parole du gouvernement, usant du même odieux chantage, a confirmé que ces ventes présentaient un « intérêt clair pour l’industrie française » – laquelle, a-t-il ajouté dans un surcroît de décence, « a aussi besoin de trouver des débouchés sur ces marchés ».

Moyennant quoi, en toute logique, la France du si pacifiste Emmanuel Macron a encore livré en 2017, et en sachant parfaitement de quelles abominations elle se rendait ainsi complice, « pour plus d’1,7 milliard d’euros d’armements à l’Arabie saoudite » – puis programmé, pour l’avenir, l’exportation supplémentaire vers ce même pays de 4 milliards d’euros de « bombes, torpilles, roquettes, missiles, autres dispositifs et charges explosifs et matériel et accessoires connexes (6) »

(1) De toute évidence, personne, à l’Élysée, n’a encore révélé à M. Macron que la Croatie était dans l’Union européenne.

(2) Source : « Conflit au Yémen : ce que la France cache », 29 août, amnesty.org

(3) Idem.

(4) Lire le dossier de Lena Bjurström publié dans le n° 1505 de _Politis.

(5) Ancien « socialiste », lui aussi…

(6) Source : l’article d’Anne-Sophie Simpère du 4 juillet sur bastamag.net

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De bonne humeur

Sébastien Fontenelle est un garçon plein d’entrain, adepte de la nuance et du compromis. Enfin ça, c’est les jours pairs.

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