Philippe Chagne : Histoire de jazz et d’amitié

Philippe Chagne fait résonner l’âme de Mingus dans un album aux multiples connivences.

Lorraine Soliman  • 10 octobre 2018 abonné·es
Philippe Chagne : Histoire de jazz et d’amitié
photo : Philippe Chagne représenté par son ami d’enfance, Laurent Dauptain.
© Laurent Dauptain

Rendre hommage à l’immense contrebassiste et compositeur Charles Mingus n’est pas chose aisée. L’expérience montre qu’avec un peu d’audace, un brin de modestie et surtout beaucoup de talent et de travail, certains y arrivent. C’est un peu l’histoire du nouveau disque de Philippe Chagne, My Mingus Soul. Une histoire qui fera date dans la discographie foisonnante du saxophoniste.

Ce disque, entièrement « fait à la main » avec Carl Schlosser (saxophoniste, flûtiste et ingénieur du son), les deux hommes en parlaient depuis trente ans. Il aura fallu attendre le bon moment, surmonter le doute omniprésent pour se lancer et lancer cette « bouteille à la mer de plus, peut-être ». Il aura également fallu réunir les musiciens indispensables, à commencer par celui qui tiendrait la contrebasse. Ce sera Laurent Vanhée : « Il a le son, il a le drive, il a le swing… Il m’a convaincu d’entamer le projet. »

La suite du casting est triée sur le volet de l’amitié et de l’admiration artistique. Une recette gagnante qui inclut l’apparition, à deux reprises, de la chanteuse Laurence Allison, dont la rondeur de la voix et la mobilité rythmique se prêtent étonnamment bien au jeu mingussien. Une des surprises de cet opus où l’interplay est irréprochable : « Je n’avais donné aucune consigne. Juste d’essayer de se répondre, de s’écouter. » Le tout dans des conditions au plus près de celles du concert : les neuf musiciens réunis dans une pièce (le studio de Carl Schlosser, à Fontenay-le-Comte), sans casques, tout en acoustique. Trois jours après, les douze titres sont dans la boîte. Un panaché des plus beaux morceaux de Mingus, certains parmi les plus connus (« Reincarnation of a Lovebird », « Fables of Faubus », « Moanin »), tandis que d’autres semblent sortir du Mingus intime de Philippe Chagne (« Weird Nightmare », « Us Is Two »). Les (ré)arrangements coulent de source, la meilleure des qualités pour ce genre d’exercice. Les deux compositions signées Chagne sont à la hauteur.

Que dire de plus ? Ce disque est une histoire de connivences qui se déclinent jusque dans le graphisme de la pochette, ornée d’un portrait du saxophoniste signée par son ami d’enfance Laurent Dauptain – clin d’œil inspiré d’une célèbre photo de Mingus. Autre histoire de connivences : c’est à plus de cinquante pour cent grâce au financement participatif que ce projet autoproduit a vu le jour.

My Mingus Soul, Philippe Chagne & friends, Ahead/Socadisc.

Concerts : 14 octobre, péniche Marcounet, Paris ; 22 février, Jazz Club, Chevilly-Larue (94) ; 23 février, L’Olivier, Wavrin (59).

Musique
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