Travailleuses domestiques de tous les pays…

En Amérique latine, en Afrique et partout dans le monde, 67 millions de personnes, à 80 % des femmes, sont employées dans le travail domestique, souvent de façon invisible.

Patrick Piro  • 9 janvier 2019
Partager :
Travailleuses domestiques de tous les pays…
photo : Une délégation de travailleuses domestiques au Congrès du Guatemala, le 1er octobre dernier. À gauche, Fidelia Castellanos, secrétaire générale du syndicat Sitradomsa.
© Patrick Piro

Peut-on vivre invisible à 67 millions ? C’est la « performance » que réalise dans le monde le secteur du travail domestique, employant à 80 % des femmes, mineures pour 17 %, parfois aux balais dès l’âge de 5 ans. Et les chiffres, issus de l’Organisation internationale du travail (OIT), sont notoirement sous-évalués, tant il est délicat de mesurer ce qui se passe dans le clos des domiciles. En France, par exemple, l’inspection du travail n’y a pas accès. Contrats rares, conditions d’exercice peu claires, protection sociale souvent inexistante : c’est un secteur informel par excellence, où perdure parfois l’esclavage – quasi-séquestration chez le patron, horaires démentiels, disponibilité totale. Quant à la rémunération, elle est fréquemment indécente. « Assurez-nous au moins un demi-salaire minimum légal ! » : poignante plaidoirie aux autorités par la présidente de l’Association malienne des aides ménagères.

Dépréciée, la profession aspire les femmes sujettes à la discrimination et à la stigmatisation, déscolarisées, mères célibataires, migrantes, indigènes… Un concentré d’adversités qu’alourdit parfois la violence sexuelle, physique ou psychologique. Notamment en Amérique latine, continent de la domesticité. Les luttes pour la ratification de la convention n° 189 de l’OIT, qui traite de leurs droits, y ont d’ailleurs été les plus actives. L’émergence d’associations et de syndicats de travailleuses domestiques n’est pas la moindre source d’admiration et d’espoir. Par essence féministe, leur quête du minimum social et humain a exigé d’elles l’effort de rompre l’isolement pour sortir de l’invisibilité, bravant la peur d’être virées, au risque de perdre le peu dont elles disposent.

Soutenez Politis, faites un don.

Chaque jour, Politis donne une voix à celles et ceux qui ne l’ont pas, pour favoriser des prises de conscience politiques et le débat d’idées, par ses enquêtes, reportages et analyses. Parce que chez Politis, on pense que l’émancipation de chacun·e et la vitalité de notre démocratie dépendent (aussi) d’une information libre et indépendante.

Faire Un Don

Pour aller plus loin…

Droit international : quand règne la loi du plus fort
Monde 9 juillet 2025 abonné·es

Droit international : quand règne la loi du plus fort

Les principes du droit international restent inscrits dans les traités et les discours. Mais partout dans le monde, ils s’amenuisent face aux logiques de puissance, d’occupation et d’abandon.
Par Maxime Sirvins
Le droit international, outil de progrès ou de domination : des règles à double face
Histoire 9 juillet 2025 abonné·es

Le droit international, outil de progrès ou de domination : des règles à double face

Depuis les traités de Westphalie, le droit international s’est construit comme un champ en apparence neutre et universel. Pourtant, son histoire est marquée par des dynamiques de pouvoir, d’exclusion et d’instrumentalisation politique. Derrière le vernis juridique, le droit international a trop souvent servi les intérêts des puissants.
Par Pierre Jacquemain
La déroute du droit international
Histoire 9 juillet 2025 abonné·es

La déroute du droit international

L’ensemble des normes et des règles qui régissent les relations entre les pays constitue un important référent pour les peuples. Mais cela n’a jamais été la garantie d’une justice irréprochable, ni autre chose qu’un rapport de force, à l’image du virage tyrannique des États-Unis.
Par Denis Sieffert
Yassin al-Haj Saleh : « Le régime syrien est tombé, mais notre révolution n’a pas triomphé »
Entretien 2 juillet 2025 abonné·es

Yassin al-Haj Saleh : « Le régime syrien est tombé, mais notre révolution n’a pas triomphé »

L’intellectuel syrien est une figure de l’opposition au régime des Assad. Il a passé seize ans en prison sous Hafez Al-Assad et a pris part à la révolution en 2011. Il dresse un portrait sans concession des nouveaux hommes forts du gouvernement syrien et esquisse des pistes pour la Syrie de demain.
Par Hugo Lautissier