Un « nouveau sommet Afrique-France »

Comme tous ses prédécesseurs, Emmanuel Macron a voulu « son » sommet avec l’Afrique. Il s’ouvre le 8 octobre à Montpellier. Un sommet d’un type « nouveau », vraiment ?

Patrick Piro  • 6 octobre 2021
Partager :
Un « nouveau sommet Afrique-France »
Près du port de Lomé, au Togo.
© Pascal Deloche/Godong / Photononstop / Photononstop via AFP

Un « nouveau sommet Afrique-France » se tient le 8 octobre à Montpellier. Nouveau ? La longue histoire des grands-messes entre chefs d’État africains et français déclenche un réflexe négatif : elles ont par trop représenté la vitrine d’un tissu de relations viciées, bâties pour préserver les intérêts de l’ancien empire au sein de son pré carré, et popularisées sous le terme de « Françafrique ». Ingérence politique, interventions militaires, favoritisme économique, complicité avec des régimes dictatoriaux, discret mépris pour les aspirations démocratiques des peuples africains, etc. Si la Françafrique n’a plus aujourd’hui l’ampleur de sa grande époque, déclinante après la présidence Chirac, elle ne s’est pas dissoute, tant s’en faut. L’intervention militaire au Sahel (et ses impasses), le soutien au dictateur tchadien Idriss Déby, le maintien dans quatorze pays africains du franc CFA, asservi à l’euro et en partie à la politique monétaire française… Autant de signes très visibles que la France joue toujours sa carte néocoloniale en Afrique.

Emmanuel Macron, comme tous ses prédécesseurs, a voulu « son » sommet avec l’Afrique. Dans un format radicalement différent : aucun chef d’État invité, mais des centaines de représentant·es de la société civile du continent pour « bâtir l’avenir de la relation entre la France et l’Afrique », autour de cinq thématiques : l’engagement citoyen, l’entreprenariat et l’innovation, l’enseignement supérieur et la recherche, la culture, le sport.

À la demande de l’Élysée, le philosophe camerounais Achille Mbembe a piloté en amont, dans douze pays de langue française, anglaise et portugaise, une mission de collecte de propositions qui seront remises au chef de l’État français. De quoi éveiller une certaine curiosité, même s’il serait naïf d’imaginer qu’il suffirait de donner la parole aux « forces vives » du continent africain pour démanteler d’un coup la Françafrique. Il n’est qu’à voir perdurer, dans ce « nouveau » sommet, ce tableau tellement colonial d’un roi Macron tenant audience pour recevoir les doléances du continent africain.

Monde
Temps de lecture : 2 minutes
Soutenez Politis, faites un don.

Chaque jour, Politis donne une voix à celles et ceux qui ne l’ont pas, pour favoriser des prises de conscience politiques et le débat d’idées, par ses enquêtes, reportages et analyses. Parce que chez Politis, on pense que l’émancipation de chacun·e et la vitalité de notre démocratie dépendent (aussi) d’une information libre et indépendante.

Faire Un Don

Pour aller plus loin…

« Au Soudan, il faudra bien, tôt ou tard, imposer un cessez-le-feu »
Entretien 7 novembre 2025 abonné·es

« Au Soudan, il faudra bien, tôt ou tard, imposer un cessez-le-feu »

Clément Deshayes, anthropologue et chercheur de l’Institut de recherche pour le développement (IRD) et spécialiste du Soudan, revient sur l’effondrement d’un pays abandonné par la communauté internationale.
Par William Jean et Maxime Sirvins
Comment la guerre au Soudan révèle les failles du contrôle mondial des armes
Soudan 7 novembre 2025 abonné·es

Comment la guerre au Soudan révèle les failles du contrôle mondial des armes

Les massacres commis à El-Fasher illustrent une guerre hautement technologique au Soudan. Derrière le cliché des pick-up dans le désert, une chaîne d’approvisionnement relie Abou Dabi, Pékin, Téhéran, Ankara et même l’Europe pour entretenir l’un des conflits les plus meurtriers de la planète.

Par William Jean et Maxime Sirvins
« Un espoir s’est levé avec la victoire de Mamdani à New York »
La Midinale 5 novembre 2025

« Un espoir s’est levé avec la victoire de Mamdani à New York »

Après la victoire du candidat socialiste dans la capitale économique du pays dirigé par Donald Trump, Tristan Cabello, historien spécialiste des Etats-Unis, est l’invité de « La Midinale ».
Par Pablo Pillaud-Vivien
À New York : « J’ai voté pour la première fois aux élections municipales et c’était pour Mamdani »
Reportage 5 novembre 2025 abonné·es

À New York : « J’ai voté pour la première fois aux élections municipales et c’était pour Mamdani »

Le candidat démocrate Zohran Mamdani, inconnu il y a un an, a été élu maire de la plus grande ville des États-Unis, grâce à une forte participation et à une campagne fondée sur les problématiques sociales.
Par Sarah Laurent