Les terroristes de Tarnac …

… écrivent au Père Noël !

Bernard Langlois  • 11 décembre 2010
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Les terroristes de Tarnac …

**Les terroristes de Tarnac, en Corrèze vous vous souvenez ? Julien Coupat et ses amis ?


Illustration - Les terroristes de Tarnac …

Ceux-là qui s’amusaient, selon la police et son ministre de l’époque (Mme Mam), à poser des bidules en ferraille, par des nuits sans lune, sur les caténaires des trains pour les faire dérailler, salopards, va !

Illustration - Les terroristes de Tarnac …

Eh bien, ils viennent de m’écrire, comme à beaucoup d’autres qui leur avaient apporté leur soutien lors de cette épreuve ridicule, qui n’ a pas encore trouvé son épilogue (la justice traînaille, pas pressée de reconnaître le vide du dossier.)

Ils m’écrivent pour me dire ceci, que je vous retransmets intégralement en vous conviant, comme je le fais moi-même, à donner à ce courrier la suite que vous dictent vos convictions et que vos moyens vous permettent.

Après tout, à Noël, on n’est pas obligé de claquer tout ses sous en boustifaille et en cadeaux idiots …**

Tarnac, le 1er décembre 2010

Bonjour!

Nous ne vous écrivons pas, aujourd’hui, pour vous entretenir des obscurs dédales de procédure dans lesquels la justice s’attache à enfermer certains d’entre nous, et dont nous essayons encore de les sortir.

Nous vous écrivons dans une perspective nettement plus joyeuse : ce que nous avons commencé à construire, depuis plusieurs années, sur le plateau de Millevaches.

Si nous nous sommes installés à Tarnac, c’est bien sûr pour la vieille tradition de résistance à l’autorité centrale, d’entraide populaire, de communisme rural qui y survivait. Notre idée n’a jamais été de nous y réfugier, mais au contraire de nous y regrouper pour y élaborer d’autres rapports sociaux, y rendre vivables d’autres rapports au monde que ceux qui dominent, et précisément
dévastent le monde.

Nous imaginions des communes qui se répartissent les cultures élémentaires et se partagent, lors de fêtes mémorables, les récoltes selon leurs besoins ; des garages collectifs, des camions sillonnant le plateau pour apporter à ceux qui ne peuvent se déplacer le ravitaillement nécessaire ; des
discussions de bar plus pointues qu’un séminaire à la fac ; une laiterie commune qui fournirait à tous le lait à prix coûtant, bref : tout un territoire qui s’affranchit peu à peu du recours à l’argent, à la police, à l’Etat.

L’offensive policière qui nous a frappés visait, entre autres choses, à détruire l’expérience qui commence à prendre racine ici, à trancher les liens qui nous unissent et nous unissent aux autres habitants du plateau : isoler pour mieux anéantir.

Non seulement l’opération n’a pas rencontré le succès escompté, mais elle a eu l’effet exactement inverse. La solidarité qui s’est exprimée ici a dépassé tout espoir raisonnable. Grâce au soutien de tant d’inconnus aux quatre coins de la France et du monde, grâce à votre soutien donc, nous avons pu traverser l’épreuve qui devait nous pulvériser.

Ce plateau, qu’il s’agissait de nettoyer de toute dissidence, finit par l’attirer
comme magnétiquement. Quant à nous, tout cela n’a fait que tremper un peu plus notre détermination, et nous attacher un peu plus fermement à réaliser nos perspectives initiales.

Le bar-épicerie est toujours là. La ferme du Goutailloux voit paisiblement croître son troupeau et ses cultures communes. Une assemblée populaire a même vu le jour sur le plateau afin d’intervenir et d’appuyer le dernier mouvement contre la réforme des retraites; et elle est intervenue.

A présent, nous nous lançons dans l’installation d’une scierie et d’un atelier bois afin de construire des habitats à bas coût pour qui vient repeupler le plateau. A compter du printemps, nous voulons entreprendre de transformer le bâtiment principal du Goutailloux en grand lieu ouvert à l’organisation de toutes sortes de rencontres. Et dans le courant 2012, nous comptons faire
l’acquisition d’un bâtiment dans le centre du bourg pour le transformer en maison de soin accessible à tous.

Or, si nous disposons de stocks d’énergie et de bonne volonté, il nous manque 35 000 € pour achever la scierie et l’atelier bois et 55 000 € pour la réfection du bâtiment principal de la ferme. Si nous voulons continuer à aller de l’avant, nous devons donc réunir d’ici fin janvier 90 000 €.

Pour la maison de soin, qui réclamera 90 000 € supplémentaires, nous avons plus de temps.

C’est un des paradoxes de l’époque qu’il faille de l’argent pour se doter des moyens de s’affranchir de l’argent. Or quelque chose nous dit que ce n’est pas l’Etat qui, dans les circonstances présentes, va nous soutenir dans cette louable direction.

C’est pourquoi nous avons créé une structure qui permet à tous
ceux qui souhaitent soutenir notre démarche de donner de l’argent et de déduire les deux tiers de leur don de leurs impôts. Cette structure s’appelle

« Les Amis de la Commune de Tarnac ». Il s’agit d’un fonds de

dotation. Elle a vocation à recueillir et redistribuer des fonds à des initiatives vivifiantes pour le plateau.

Nous vous écrivons pour vous demander de nous aider, dans la limite de vos possibilités, à continuer sur notre lancée et rendre au beau mot de partage un sens non dérisoire.

Des Amis de la Commune de Tarnac.

NB : Ceci est un appel à l’aide financière parce que, dans la séparation régnante, donner de l’argent est bien souvent le mieux que l’on puisse faire pour témoigner de son attachement à ce qu’existe quelque chose à quoi nous n’avons pas le loisir de participer. Il va de soi que ceux qui disposent des savoir-faire, de la liberté ou simplement du désir de nous aider de leurs mains, par leur participation directe, sont les bienvenus. Ils savent où nous trouver.

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