A moi Leconte, deux mots !…

[ * … Quand Denis Robert se paie la tête d’un arriviste du Paf : jouissif !* ]

Je vous le recrache illico, ça vient de m’arriver. C’est une suite indirecte de l’affaire Clearstream, celle-là même qui a valu à Denis Robert, l’enquêteur intègre et courageux attaqué, dénigré, harcelé sans relâche pendant des années, une victoire judiciaire en rase campagne dont il n’est pas peu fier, à juste titre : je vous renvoie aux épisodes précédents, ici, là et encore là … Voici les derniers développements, autour du film d’un type sans talent ni vergogne, mais bien en cour. Pas besoin d’en dire plus, lisez le billet de Denis : un régal d’intelligence et de vacherie qui devrait vous plaire autant qu’il m’a mis en joie !

Bernard Langlois  • 17 avril 2011
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Illustration - A moi Leconte, deux mots !…

Le super plus grand bal des méga super plus grands menteurs

C’est une légère démangeaison. Vous vous grattez puis vos neurones vous
emmènent ailleurs. Vous oubliez. L’irritation revient. Vous recommencez.
Vous vous dîtes « quelle bande de cons ! » . Aussitôt, parce que vous avez
des choses importantes à faire, votre esprit part ailleurs. Un journaliste
vous rappelle. Le parasitage revient. Léger embarras. Est ce que j’ai un
avis sur le film de Daniel Leconte « le bal des menteurs » ? Ben non.

Ce sera probablement mauvais. Depuis une dizaine d’années, ce gars-là est un condensé de ce qui se fait de pire dans le PAF. Pensée facile, brossage dans
le sens du poil, courbette devant le pouvoir, rabâchage de poncifs, ennui
sidéral, tromperie et détournement de l’information. Leconte est le champion
toute catégorie du documentaire bidonné sur la banlieue.

Seul son film sur Carlos permet de rehausser le niveau, mais il n’a fait que récupérer les intuitions d’Olivier Assayas, le réalisateur.

Si on me demande de choisir entre Cauet et Leconte, je prends le premier sans l’ombre d’une hésitation. C’est une question d’éthique. Et je ne plaisante pas.

Au mieux, Leconte anime des débats insipides. Au comble de l’arnaque, il promeut des shows faisandés où les cibles sont musulmanes et où les stars de l’info se la jouent rebelle. Ce gars-là est devenu, pour une petite secte dont je fais parti, un personnage hilarant. Qu’y a-t-il eu de plus comique à la
télévision depuis des lustres qu’Axel Ganz ou Jean Pierre Elkabbach en « stars de l’info » luttant pour l’indépendance des médias dans cette perle de désinformation qu’est « Main basse sur les médias » ? [^2]

Qu’il continue à cachetonner à Arte, à sous louer un appartement à France
Inter, à lécher les tapis de Canal, je m’en branle. Je sais, je ne suis pas
poli. Mais c’est dimanche matin et je n’ai pas le goût des efforts
sémantiques. La seule chose que je lui demandais était de me foutre la paix.
C’était une sorte d’accord tacite entre nous. J’ai des livres à écrire, des
films à réaliser, des toiles qui sèchent. Peu de temps à perdre. Mais voilà,
le « bal des menteurs » est sorti le mois dernier. J’ai été appelé par des
radios et des journaux pour réagir. J’étais dans un premier temps au
générique avec la mention « avec Denis Robert dans son propre rôle » . Ma
victoire judiciaire — magnifique — contre Clearstream les a obligés in
extremis à virer les passages me concernant et ma présence au générique.

Daniel Leconte n’est pas seul. Ils sont une petite bande avec Philippe Val,
Richard Malka, un avocat qui est aussi celui de Clearstream et Elisabeth
Levy (l’ex de Malka). Denis Jeambar vient compléter la bande. Je ne
comprends pas trop ce que Jeambar est venu faire dans cette galère mais tant
pis pour lui.

Ce premier « bal des menteurs » , ratage total en nombre d’entrées, servait
de bande annonce à la soirée Canal programmée cette semaine. Quatre heures et trente minutes de saga Clearstream. Je parle ici du show judiciaire et de la guerre entre Villepin et Sarkozy. Comme la version était plus longue qu’au cinéma, Leconte a eu la riche idée de changer son titre. C’est devenu « Le grand bal des menteurs » .

Pendant des semaines, Leconte, Jeambar et les petites mains qui ont fait ce
film m’ont poursuivi, écrit, supplié de parler devant leur micro. J’ai
toujours refusé. Je m’en suis même expliqué dans un courrier très poli [[ Vendredi 8 janvier 2010.

Cher Daniel Leconte,

Je viens de prendre connaissance de votre courrier du 16 décembre dernier.
Je me vois en l’état dans l’obligation de décliner votre proposition de
participer à votre film. A cela plusieurs raisons.

Vous avez tenu des propos publics (sur France Inter entre autres)
désobligeants et infondés sur mon rôle dans ce dossier, reprenant presque
mot à mot l’argumentation de Clearstream. Vous n’avez donc visiblement lu
aucun de mes livres ni vu mes films, sinon vous ne tiendriez pas ces propos.

Pendant le procès, des membres de votre équipe ont fait le tour des
journalistes présents pour leur demander un avis sur mon travail. Les
questions posées étaient pour la plupart malveillantes à mon égard et très
orientées. Elles visaient essentiellement à dénigrer mon travail.

Lors de réunions préparatoires à votre film, vous avez, devant plusieurs
témoins, proposé de « démolir » mon enquête. J’étais une cible pour vous et
votre conseil Richard Malka. Ce même Malka a participé à des réunions de
production dans vos locaux de « Doc en stock ».

Je vous rappelle que Richard Malka est l’avocat de Clearstream et le
principal responsable des plaintes déposées depuis huit ans maintenant
contre moi (et contre Canal plus). Il est, entre autres, à l’origine de ma
mise en examen dans le dossier qui nous occupe et pour lequel j’espère bien
être relaxé.

Vous avez le droit d’avoir les amis et les avocats que vous voulez mais
convenez que je sois en position de mettre en doute votre bonne foi et votre
impartialité. Qu’est ce qui me prouve en effet, hormis la présence à votre
casting de Denis Jeambar, votre équité?

J’ai beau me creuser. Je ne vois pas.

Vous souhaitant bonne réception de cette missive, recevez l’assurance de mes
respectueuses salutations.]]

En plein procès, Malka, l’avocat de Clearstream, avait soufflé à Leconte de
réaliser une séquence sur moi. Ils avaient eu la riche idée d’interroger
des journalistes pour leur demander ce qu’ils pensaient de mon travail. Tout
cela a sauté au montage.

Ni Florian Bourges qui m’a remis les premiers listings, ni moi n’avons voulu
leur parler, nous avons disparu du film, le grand comme le petit. Et c’est
tant mieux. D’après ceux qui l’ont vu, je passe pour un idéaliste qui a
donné les listings à Lahoud et Florian à peu près pareil. Ça me va très
bien. Je ne suis pas énervé, ni atteint parce qu’ils peuvent dire ou penser
de moi. Je suis super calme. C’est dimanche. Il faut que je me dépêche à
aller acheter les croissants. Mon fils m’attend pour qu’on regarde Ironman2.

Mais je viens de voir ma tronche dans les bande annonces de Canal. J’allume
mon Mac, me branche sur le site du Monde. Boum. Je retrouve ma photo dans le programme télé. J’ai à peine le temps de me retourner qu’une alerte Google montre une folle furieuse sur I télé qui raconte n’importe quoi sur
Clearstream. On se sert de moi. On joue sur mon coté taiseux. Je redeviens
ce personnage de fiction que les médias et les communicants de Clearstream
ont fabriqué. Ces dérapages crispent beaucoup de gens. Un peu trop pour que
je reste silencieux.

Je vais donc ici formuler ce que je pense de cette opération « Balloche ».
Grand ou petit, c’est une quintessence de l’arnaque.

Il existe un « bal des menteurs » . Un super mega grand bal des super gros
menteurs. Imad Lahoud est un menteur. Jean Louis Gergorin a menti. Dominique de Villepin et Nicolas Sarkozy aussi. Je n’ai pas menti. Florian, non plus. Je m’en expliquerai au procès de mai où je suis ravi de refaire un petit
tour, fort de ma relaxe, encore plus fort de ma victoire en cassation contre
ces menteurs. Ces types qui, depuis dix ans, ont voulu gommer une réalité.
Malka et ses amis Val, Leconte, Levy en tête de peloton.

Ils ont perdu. J’ai gagné. Ce sont eux les falsificateurs.

Le film de Leconte et Malka est une opération mensongère. Parce que Malka
est l’avocat de Clearstream. Parce que ce n’est pas une enquête qui prend le
temps de réfléchir et de creuser, parce qu’ils jouent à fond le jeu du spectacle judiciaire et pas de la justice. Parce qu’ils mettent en avant l’émotion et la facilité contre le recul et l’intelligence. Parce qu’ils sont partie prenante dans ce dossier. Parce que Val a été nommé à Inter par Carla Bruni et que je ne vois pas comment ni pourquoi ils n’auraient pas cherché à tout prix à faire plaisir à l’Elysée via son ami Leconte. Parce qu’ils choisissent délibérément le camp de Sarkozy contre celui de Villepin. Et je sais de quoi je parle, je suis le premier à avoir expliqué le rôle de Dominique de Villepin dans ce dossier.

Malgré leurs heures de rushes et leurs efforts marketing, ils n’ont toujours
rien compris à la finesse, à la folie, à la beauté de cette histoire. Et c’est normal, leur regard est orienté. Leur pensée est creuse.

Eh oui. Le pire est là. C’est une belle histoire. La première comme la seconde.

Je regarderai sûrement mardi « Le grand bal des menteurs » à Canal. Ce sera probablement intéressant comme objet d’étude. Je vous conseille surtout de ne pas louper deux semaines plus tard, le 3 mai « Lundi Investigation » : Canal rediffuse « L’affaire Clearstream racontée à un ouvrier de chez Daewoo » . C’est un bien meilleur film.

On m’attend pour les croissants. Je vais me faire étendre par Ironman si je
continue à perdre mon temps à gratter. Tiens, c’est bizarre. Ça ne me
démange plus.

DR , le 17 avril .

[ A l’attention des nouveaux lecteurs de ce blog : je requiers, de la part des contributeurs au débat et pour qu’il se mène plus commodément, une signature (pseudo si ça vous chante) pour chaque contribution ; faute de quoi, à la trappe ! ]

[^2]: Arte, 8 février 2010. Avec mes copains, on a un gimmick, on se passe cinq minutes de ce chef d’œuvre et on est tellement mort de rire qu’on se demande toujours quel espion magnifique a pu pousser si loin l’art de la subversion ?

Publié dans
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Temps de lecture : 9 minutes
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