La Russie envahit la Crimée sous les applaudissements (gênés) de Jean-Luc Mélenchon

Claude-Marie Vadrot  • 2 mars 2014
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« Les ports de Crimée sont vitaux pour la sécurité de la Russie, il est absolument prévisible que les Russes ne se laisseront pas faire, ils sont en train de prendre des mesures de protection contre un pouvoir putschiste aventurier, dans lequel les néonazis ont une influence tout à fait détestable. Nous Français, n’avons rien à faire dans une histoire pareille, nous n’avons rien à faire à encourager les provocations contre les Russes, cela dit sans sympathie pour le gouvernement russe » (Jean-Luc Mélenchon, samedi 1er mars)

Que dire face à cette injure aux morts ukrainiens qu’il a ensuite tenté de modérer au nom des « intérêts de la France » ? Que Monsieur Mélenchon ne sait plus quoi dire ou quoi faire pour se faire remarquer. Ou bien que le vieux stalinien qui sommeillait en lui, a repris vie. Les deux probablement. Il faut n’avoir jamais mis les pieds sur Maidan et en Ukraine, ou bien être passé en courant comme pour signer la feuille de présence au Parlement européen, pour proférer une telle énormité; pour oublier le sacrifice de ceux qui, à tort ou à raison, préfèrent le mode de vie politique des pays de l’Union européenne à celui de la Russie. Ce pays dans lequel Vladimir Poutine envoie ses opposants en prison et les écologistes en camp de travail. Mais qui a entendu Monsieur Mélenchon condamner la répression et les destructions environnementales de Sotchi et de ses jeux d’hiver?

Bien sur, je l’ai écrit ici à plusieurs reprises après avoir visité la place Maidan avant les massacres, il y avait de tout derrière les barricades et dans les rues de Kiev. Des nationalistes aux slogans plus qu’ambigus, étaient présents parmi les insurgés. Tout comme les popes appelant leur dieu orthodoxe rétrograde à la rescousse. Mais l’immense majorité des manifestants n’avait qu’un seul souhait : se débarrasser d’un pouvoir dont la gestion économique, sociale, écologique et politique ressemblait de plus en plus à ce qui se passe en Russie. Alors, ces révoltés, déçus par les lendemains de la révolution Orange ont voulu aller plus loin, crier plus fort. Ils avaient vécu une révolte tranquille sans effets tangibles, alors ils ont choisi la voie d’une Révolution imposant leur volonté; sans demander leurs origines idéologiques à ceux qui acceptaient de se battre après avoir occupé la rue pendant trois mois. Ils ne méritent pas les insultes d’un personnage dont ils n’ont heureusement jamais entendu parler.

Monsieur Mélenchon a oublié qu’une Révolution, cela se fait avec tout le monde, avec tous les volontaires pour prendre des risques. Faut-il rappeler que les acteurs et responsables de la Résistance française venaient de tous les horizons politiques, de l’extrême droite au Parti communistes en passant par les démocrates-chrétiens de l’époque? Ils étaient au moins d’accord, même dans des réseaux différents, pour résister ensemble. Le tri a été fait, plus ou moins bien, après la Libération quand le droit de vote a été rendu à ceux pour lesquels les résistants de toute idéologie s’étaient battus. Faut-il rappeler que le Printemps de Prague qui a tenté de chasser les Soviétiques rassemblait des gens aux origines idéologiques très dissemblables ?

Quand à l’autre argument qui consiste a expliquer qu’il ne faut pas faire prendre un risque à la France, l’allié objectif de Poutine l’aurait probablement avancé quand la Pologne a été envahie par l’armée allemande en août 1939, où quand l’Allemagne Nazie a annexé l’Alsace parce que l’on y parlait allemand.

Que dire de plus sinon espérer que Monsieur Mélenchon fera pénitence pour avoir parlé, ou pire, pensé, sans réfléchir. En piétinant tous les morts et les centaines de blessés de Kiev et d’autres villes dont certains sont ou… étaient des amis.

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