Plaidoyer pour les insectes menacés en France et dans le monde

Claude-Marie Vadrot  • 6 mars 2021
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**_Deux scientifiques renouvellent les avertissements sur la disparition de ces auxiliaires de l’agriculture et de la survie humaine_**

Les insectes ça gratte, ça pique, ça bzzz, ça bourdonne, ça se noie dans les verres ou dans la soupe et ça surgit de n’importe où et de n’importe où sans prévenir ; et ça court même sur les murs. Et évidemment dans l’herbe. Bref cela n’inspire généralement aucune sympathie et au mieux de l’indifférence. Sauf quand il s’agit de papillons ; comme le petit « citron » jaune qui vient de se réveiller dans mon jardin après avoir hiverné, ce qui est exceptionnel pour ces espèces. Donc, en général, les êtres humains ne portent pas la même attention aux insectes qu’aux éléphants, aux tigres, aux pandas, aux girafes, aux rhinocéros, aux panthères ou aux autres mammifères en voie en voie de disparition. Ce phénomène de caractère inéluctable vaut aussi pour tous les insectes, ceux que nous voyons fugitivement comme ceux qui se dissimulent dans les moindres replis de la nature ou dans les mares**.**

**Plus d’un miliion d’espèces**

Pourtant, sur la Terre, volent ou rampent plus d’un millions d’espèces d’insectes identifiés et les entomologistes en découvrent au moins une dizaine de milliers chaque année. Mais pour les mêmes raisons que les grands mammifères et les oiseaux, un tiers de ces insectes se trouve déjà en voie de disparition ou d’extinction ; et 60% des papillons ont déjà disparu dans tous les espaces cultivés. Dans les villes, les habitants les pourchassent avec des « bombes » aux noms évocateurs mais en vente libre. Et dans la nature cultivée, ce sont les agriculteurs qui font le travail avec des pesticides. Il ne leur reste que des espaces cultivés en bio, jardins ou champs, qui échappent aux massacres et à l’empoisonnement.

C’est d’ailleurs aux vols des papillons et à la présence d’insectes que l’on peut repérer ces paradis naturels. Inquiétés par les hécatombes en cours, deux scientifiques , Denis Richard et Pierre-Olivier Maquart, viennent de publier un livre (1) plaidoyer pour les insectes _« dont les populations et la diversité sombrent bien qu’ils ne soient pas des vedettes des reportages animaliers et bien qu’ils ne soient qu’exceptionnellement présentés dans des parcs zoologiques (…) ils méritent une pleine considération en raison de leur rôle primordial dans les écosystèmes et les services qu’ils rendent à l’Homme »._

**Un équilibre indispensable**

Ces deux spécialistes exposent et énumèrent une impressionnante liste des bonnes et multiples raisons qui justifient leur protection, voire leur sauvetage. Cela va du maintien des chaines alimentaires, à la nourriture de nombreux oiseaux en passant par le contrôle de la masse végétale, à la pollinisation des fruits et légumes, à la fertilisation des sols et même le contrôle d’autres insectes qui prolifèrent de trop. Les « services rendus » sont innombrables mais ignorés.

Au point que si les avertissements des protecteurs de la nature et des cercles scientifiques publiés en octobre 2017 dans une revue spécialisée ont été vite oubliés. Seuls les automobilistes avaient enfin compris pourquoi leurs pare-brise restaient de plus en plus propres… L’autre réalité n’émeut guère que quelques scientifiques : vers la fin du 21° siècle, si l’hécatombe se poursuit aux mêmes rythmes, et si l’agriculture intensive et chimique perdu, il n’y aura pratiquement plus d’insectes et la main de l’Homme ne pourra pas les remplacer.

(1) _Il sauver nos insectes_, Ed Delachaux et Niestlé, 192 pages avec photos, 29,90 EUROS (2)

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Temps de lecture : 3 minutes
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