Bové y va, Hulot s’en va

Michel Soudais  • 24 janvier 2007 abonné·es

C’est quasiment acquis. À l’issue de la réunion nationale des collectifs unitaires antilibéraux de Montreuil (Seine-Saint-Denis), aucun des 600 délégués ne doutait que José Bové serait candidat à la présidentielle. Le syndicaliste paysan, qui avait annulé sa participation au Forum social mondial de Nairobi pour s’enquérir du soutien des collectifs opposés à la candidature de Marie-George Buffet, a lui-même indiqué qu’il se déclarerait officiellement le 1er février. Histoire de vérifier qu’il peut aller jusqu’au bout. José Bové a d’ailleurs demandé à ses partisans de partir à la chasse aux signatures d’élus : « Si au lieu d’avoir simplement les 500 maires, on en avait 600, 700, 800 et pourquoi pas 1 000, ça serait aussi un signe que notre campagne aujourd’hui est portée sur tout le territoire. » Mais ce délai vise surtout à ne pas gêner la Confédération paysanne, son syndicat, en campagne pour les élections aux chambres d’agriculture jusqu’au 31 janvier.

Dimanche matin, les partisans de José Bové, la veille encore sceptiques sur l’issue de cette réunion, malgré les 25 000 signatures engrangées sur Internet, savouraient leur victoire. « Le coup de force a réussi » , nous confiait Jean-Jacques Boislaroussie (Alternatifs), soucieux d’ « appeler les choses par leur nom » . Tout au long de la journée de samedi, des délégués des collectifs se sont succédé au micro pour balayer les dernières réticences émises par le collectif national, désireux de préserver l’objectif de rassemblement des forces du « non » de gauche. Exprimant leur « colère vis-à-vis du collectif national » , accusé de « renoncement » et de « résignation » face à la « logique des appareils » de la LCR et du PCF, ils n’ont eu de cesse d’obtenir que la réunion se prononce en faveur de leur champion.

Le texte adopté sur la présidentielle est le fruit d’un compromis. Il « propose » que José Bové soit le candidat « de rassemblement de la gauche antilibérale, féministe, écologique et solidaire » . Il précise que « cette candidature aura pour base les textes adoptés par les collectifs » , les 125 propositions programmatiques et le texte « ambition et stratégie » , que « cette bataille sera collective » , qu’y prendront part des « porte-parole représentant toutes les sensibilités du rassemblement », et que « chaque collectif et chaque militant décideront de leur engagement » . Il « appelle le PCF et la LCR » , qui s’y refusent toujours, « à renoncer à des candidatures séparées » . Il annonce enfin l’organisation immédiate d’ « une série de meetings » , la création d’ « un collectif de campagne » , qui se réunira le 27 janvier, et la tenue d’une « nouvelle réunion nationale » les 10 et 11 mars, « pour faire le point de l’action engagée, vérifier qu’elle suscite une dynamique populaire et décider des suites à lui donner » .</>

À cette date, on saura si la candidature de José Bové a des chances de rassembler la gauche antilibérale ou si elle divise un peu plus cette famille politique, qui comptait déjà deux candidats. Pour l’heure, les pro-Bové divergent sur leurs motivations. Moyen tactique d’imposer le rassemblement à des appareils politiques réticents ? Ou prémice d’une nouvelle force politique qui se constituerait contre les partis existants ? Deux options pour deux avenirs bien différents.

Nicolas Hulot incarne aussi, d’une autre manière, cette défiance à l’égard des partis, bien dans l’ère du temps. Fort du soutien d’un demi-million de citoyens à son « pacte écologique » lancé en novembre, il avait fait planer le doute sur sa candidature. Lundi, il a « choisi de faire confiance à la parole et à l’engagement des candidats » qui, pour les principaux, ont tous signé son pacte et « répondu avec sérieux » à ses propositions. Cette non-candidature, assure-t-il, vise à « transformer » l’élan du Pacte écologique « en véritable lobby des consciences » et à aider « la mutation écologique de la société » .

S’il renonce pour cette fois, l’animateur-écolo se contente de « suspendre [son] ingérence politique » . Le mot est pesé. Nicolas Hulot rêve toujours de transcender les clivages politiques. Le Pacte écologique, a-t-il expliqué, « c’est un désir de réconciliation » . Persuadé d’être la voix de la « majorité silencieuse » qui « demande aux politiques de mettre fin » à leur « affrontement » , il n’exclut pas de revenir, si ceux-ci oublient leurs engagements.

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