Zéro tracas

André Cicolella  • 24 janvier 2007 abonné·es

Sans être un publivore fanatique, difficile d’échapper au jingle de MMA (Mutuelles du Mans assurances) « Zéro bla-bla, zéro tracas, MMA ! » . On pensait que c’était à destination des futurs clients. En fait, le « zéro tracas », c’est surtout pour MMA ! Cette fausse mutuelle et vraie assurance privée lance en effet une campagne sur un produit qui, moyennant une surcotisation, propose à l’assuré de récupérer une partie de sa cotisation en cas de non-dépassement. Public visé : les jeunes, dont on espère qu’ils se diront : « Les jeunes, qui dépensent peu, n’ont pas à payer pour les vieux, qui dépensent beaucoup. » Le président de MMA a expliqué la philosophie du projet dans le Monde (du 17 octobre 2006) : « Il s’agit d’un essai. […] Nous sommes au début d’un remaniement de l’offre d’assurance en matière de santé. »

Oh, surprise ! Dans le même article, le président de la Fédération française des sociétés d’assurance (FFSA) a trouvé l’initiative excellente, et explique clairement l’objectif : « Nous avons le plus grand intérêt pour les innovations enrichissant l’offre d’assurance. Cette démarche […] s’assimile à une démutualisation partielle. »

À cette déclaration fait écho le commentaire du député UMP Jean-Michel Dubernard, président de la commission des Affaires sociales, souvent présenté comme futur ministre de la Santé de la droite : « Les initiatives du type MMA sont liées à l’avenir de l’assurance-maladie… Si notre plan à moyen terme ne tient pas toutes ses promesses, il faudra prendre des mesures plus sévères, comme celles qui ont cours en Allemagne. Des offres plus individualisées trouveront leur place. Les mesures allemandes ont visé une efficacité immédiate. Mais, après deux ans, le déficit resurgit. Personne n’a la solution, mais la France et l’Allemagne peuvent imposer au reste de l’Europe un modèle où le collectif et l’individuel auront leur place. »

Au rythme où va le déficit de l’assurance-maladie, une telle déclaration prépare le terrain pour une rupture à la mode sarkozienne, c’est-à-dire la privatisation. Comment ne pas rapprocher en effet tout cela du passage des Pays-Bas à un tel système ? Ce pays disposait depuis 1941 d’un système de caisse, comme en France et en Allemagne, aujourd’hui privatisé. La Caisse nationale d’assurance maladie (Cnam) en concurrence avec Axa et AGF… Çà, c’est une vraie rupture ! Évidemment, la sélection par le risque a été interdite, mais il n’y a aucune garantie sur le long terme. Et ce serait faire injure aux assurances de penser que leur stratégie se limite aux Pays-Bas. Un enjeu majeur à mettre à l’agenda de la campagne présidentielle !

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