Biocoop résiste

La coopérative se mobilise contre une directive qui affaiblira les critères bios.

Clotilde Monteiro  • 12 avril 2007 abonné·es

Pour la coopérative Biocoop, tous les indicateurs sont au vert. Le premier réseau de magasins bios en France affiche une insolente progression de son chiffre d’affaires. Il est de 250 millions d’euros en 2006, en hausse de 22 % par rapport à 2005. En cinq ans, Biocoop a ouvert cent points de vente supplémentaires et vient d’inaugurer une nouvelle plate-forme de distribution à Sainte-Geneviève-des-Bois, en région parisienne, destinée à servir le quart Nord-Est de la France. Mais la mise en application d’un nouveau règlement européen concernant la bio pourrait à terme peser sur ce succès.

Prévue pour 2009, la future directive suscite d’ores et déjà de nombreuses réactions, puisque la présidence allemande de l’Union européenne souhaite clore les discussions dès juin prochain. Claude Gruffat, PDG de Biocoop, n’en demeure pas moins catégorique : « On ne baissera pas la garde sur la qualité de nos produits ! » Cette nouvelle réglementation prévoit notamment la création d’une catégorie de produits qui ne comporteront qu’une part minime d’ingrédients d’origine biologique. « Si nous ne sommes pas entendus, nous appellerons les consommateurs ainsi que les producteurs à se mobiliser avec nous pour qu’une nouvelle réglementation satisfaisante puisse voir le jour. » En cas d’échec, Claude Gruffat prévoit de renforcer les engagements pris par Biocoop envers les producteurs de produits bios : « Nous nous engagerons dans nos filières sur des volumes et sur la durée, c’est à nous, distributeur, de jouer ce jeu pour soutenir les producteurs et continuer à proposer au consommateur d’authentiques produits bios. »

Outre la commercialisation des produits issus d’une agriculture biologique durable, 11 % de l’activité de Biocoop provient du commerce équitable, dont 6 % pour le commerce Nord-Sud avec des pays en développement, et 5 % pour le commerce Nord-Nord de produits bios issus de l’agriculture française locale. Claude Gruffat insiste sur le fait que cette dynamique ne tient en rien au contexte français : « Il y a huit ans, la France était en première position sur le marché de la bio, elle est aujourd’hui en 15e position sur 24 pays. » Un retard qui ne facilite pas la tâche de la coopérative. La notion de construction de filière, chère à ce réseau, et qui permet de soutenir les producteurs locaux, bute sur « un manque de soutien criant au niveau national ». En témoignent les difficultés à trouver des abattoirs et des ateliers de découpe adaptés à la viande bio.

Une situation paradoxale, car la consommation de produits bios ne cesse d’augmenter, alors qu’à l’autre bout de la chaîne le monde de la production stagne. Claude Gruffat déplore ainsi être « contraint d’importer des pays voisins 60 % de [ses] matières premières alors que la France occupe le premier rang des pays agricoles européens » . Pour lui, « c’est un constat d’échec » .

Avec ou sans directive européenne, le réseau continuera d’occuper une place à part. Les acteurs de cette association devenue société anonyme coopérative en 2002 s’engagent à respecter la charte élaborée à la création de Biocoop, en 1987. Elle garantit « la transparence de [leurs] activités, la traçabilité de [leurs] approvisionnements, l’équité et la coopération dans [leurs] relations commerciales » . La plupart des membres sont aussi des militants du réseau Sortir du nucléaire et participent à la lutte pour une culture sans OGM.

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