Grenelle antipiratage

Christine Tréguier  • 20 septembre 2007 abonné·es

Après le vote en juillet 2007 de la très répressive loi DADVSI (Droits d’auteur et droits voisins dans la société de l’information), qui n’a abouti qu’à quelques jugements contradictoires où les pirates sont parfois condamnés, parfois relaxés ; et après la signature en grande pompe de la « charte d’engagements pour le développement de l’offre légale de musique en ligne, le respect de la propriété intellectuelle et la lutte contre la piraterie numérique » entre FAI (fournisseurs d’accès à Internet) et maisons de disque, voici venir la mission sur « la lutte contre le téléchargement illicite et pour le développement des offres légales d’oeuvres musicales, audiovisuelles et cinématographiques ». À la demande expresse de Nicolas Sarkozy, qui n’est pas homme à laisser perdurer le « téléchargement sauvage » et affiche sa volonté d’être le sauveur de l’industrie culturelle, les ministres de l’Économie, Christine Lagarde, et de la Culture, Christine Albanel, ont confié à Denis Olivennes, PDG de la Fnac, l’énième mission initiée par ce gouvernement. Charge à Olivennes et à ses trois collaborateurs ­ Isabelle Falque Pierrotin, présidente du Forum des droits sur l’Internet ; Olivier Bomsel, économiste ; et Pascal Faure, ingénieur ­ d’entendre les protagonistes de ce dossier et de trouver les solutions. Il y a toutefois peu d’espoir que la France fasse un miracle là où tous les autres ont jusqu’ici échoué. D’autant que les internautes et les consommateurs sont, comme à l’habitude, étrangement absents de la liste des interlocuteurs pressentis. Comme le fait remarquer le site Ratiatum, « le piratage n’est qu’un microphénomène dans les changements globaux qu’entraîne Internet dans la consommation des biens culturels. Cela se joue à l’échelle planétaire, pas entre les six murs de l’Hexagone ».

Seul changement de ton dans le discours, la ministre de la Culture fait apparemment profil bas sur la répression, qui « n’apporte pas toutes les réponses » et préfère parler de « promouvoir les bonnes pratiques de diffusion de la culture dans l’ère numérique » . « Le piratage ne doit pas être le seul moyen de trouver une oeuvre, même rare » , a-t-elle même dit en juillet, semblant tirer l’oreille des maisons de disques qui n’ouvrent que parcimonieusement leurs précieux catalogues à la vente en ligne.

Denis Olivennes, lui, oscille entre optimisme et prudence. La mission n’aboutira pas, en deux mois, à « la grande réforme que tout le monde attend » , mais plutôt à « quelques mesures empiriques et pratiques » tenant sur une feuille A4. Ce qui ne l’empêche pas de la qualifier de « mini-Grenelle de la gratuité ».

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