Puzzle électrique

Deuxième album magnifiquement hanté de Blanche, un groupe de Détroit passé à l’ouest.

Jacques Vincent  • 18 octobre 2007 abonné·es

On croise tellement de disques qui ressemblent à des appartements vides ­ et d’ailleurs manifestement pas conçus pour abriter âme qui vive ­ qu’on est particulièrement heureux de trouver la maison Blanche aussi habitée. Profondément ancré dans l’histoire de la musique populaire américaine, le groupe nous console aussi de tant de ses confrères anglais qui n’imaginent même pas qu’il ait pu se passer quoi que ce soit avant les années 1980.

Pour qui découvre Blanche avec ce deuxième album et commence à s’intéresser au groupe, chaque information arrive comme un élément d’un puzzle qui s’emboîte miraculeusement avec le reste. Entend-on ici le fantôme de Johnny Cash, qu’on apprend que Dan John Miller et Tracee Mae, le couple qui constitue le pivot du groupe, jouent dans Walk The Line , le film consacré à l’homme en noir. Et les quelques colères électriques qui émaillent le disque (et en rappellent d’autres) collent très bien avec cette reprise du Gun Club figurant sur le premier album, qui constitue un argument de plus pour défendre un groupe qui sait se souvenir de feu Jeffrey Lee Pierce, dont l’énergie destructrice a engendré des disques inoubliables mais a aussi fini par avoir sa peau.

Originaire de Détroit, le groupe n’était pas, a priori , destiné à prendre ce genre de chemin, mais la géographie mentale s’accommode souvent mal de la cartographie. Il récidive sans vergogne avec ce deuxième album enregistré à Nashville, qui évoque des errances dans des étendues désolées par une instrumentation qui fait la part belle aux banjos, mandolines, violons et autres pedal steel guitars . Les guitares gavées d’écho et les voix des deux principaux protagonistes, à qui il arrive de sonner comme un mélange des Cramps et du Jefferson Airplane, font le reste. Il ne faudrait pas pour autant voir Blanche comme une maison de fantômes ou une bande de passéistes. Leur façon d’endosser, au sens propre comme au sens figuré, des costumes du passé n’est que leur façon singulière d’être au présent.

Culture
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