« Construire une communauté de destin »

Pour Gérard Claisse, vice-président de la communauté urbaine du Grand Lyon,
en charge de la participation citoyenne,
il est nécessaire de restaurer
le débat public
à l’échelle de l’agglomération.

Marc Endeweld  • 28 février 2008 abonné·es


Les débats autour du « Grand Paris » le soulignent, la question du gouvernement des agglomérations est aujourd’hui primordiale, comment travaillez-vous au Grand Lyon~?

Effectivement, le développement territorial se joue désormais au niveau des aires urbaines. C’est pourquoi le processus qui a initié le développement des intercommunalités est irréversible. Quand la communauté urbaine de Lyon a été créée en 1969, elle était alors considérée comme une « communauté de moyens ». Au milieu des années 1970, elle s’est transformée en une « communauté de projets » permettant de fixer les grandes lignes stratégiques en matière de déplacements, d’urbanisme, d’habitat, de développement économique…

Aujourd’hui, devant les enjeux métropolitains, nous essayons de construire une « communauté de destin », de créer un sentiment d’appartenance à l’échelle de l’agglomération. Car l’intercommunalité présente bien un risque de régression démocratique. Alors que nous actionnons un grand nombre de politiques publiques qui concernent directement la vie quotidienne des gens, nous n’avons pas à rendre compte directement des choix que nous faisons. Il est urgent de mettre en place le suffrage universel des conseillers communautaires. Le plus tôt sera le mieux. Car seul le suffrage universel permettra de réinjecter de la politique.

Mais en l’absence du suffrage universel, comment tentez-vous de rapprocher les citoyens des décisions communautaires~?

L’absence de représentation politique issue directement des urnes rend encore plus indispensable la nécessité de travailler sur les deux autres piliers de la démocratie~: la participation citoyenne et la délibération publique. Car délibérer, c’est restaurer le débat public, c’est faire en sorte que les différents intérêts puissent s’exprimer, se confronter, et qu’émergent différentes représentations de l’intérêt général. C’est tout un changement de culture qu’il est nécessaire d’accompagner, tant au niveau des élus qu’au niveau des fonctionnaires, et, bien sûr, au niveau des acteurs locaux… Avant, la communauté urbaine s’adressait à ses 55 « clients », c’est-à-dire aux 55 maires qui en faisaient partie et aux usagers. La communauté urbaine fabriquait alors du contribuable-usager, pas du citoyen.

Or, il est nécessaire désormais de fabriquer de la citoyenneté à l’échelle de l’agglomération, c’est-à-dire de s’adresser à 1,2 millions d’habitants. En 2001, à travers le conseil de développement et une charte de la participation, nous avons mis l’accent sur la concertation avec les habitants, et pas uniquement sur l’information, pourtant cruciale, ou la simple consultation. Bref, il s’agissait de construire une offre de participation, de faire en sorte que la concertation devienne un volet à part entière de la conduite de l’action publique. Et, aujourd’hui, en s’organisant à l’échelle de l’agglomération, de nombreuses associations sont devenues nos interlocuttrices. Bien sûr, tout n’est pas parfait. Mais sur certains grands projets, comme l’aménagement des Berges ou Lyon Confluence, nous avons organisé jusqu’à 30 ateliers de concertation~! Les élus se retrouvaient alors en position d’écoute, et on accompagnait les habitants pour passer de l’expression d’une opinion à un jugement informé. Nos projets se sont enrichis de cette mise en débat et de l’expertise d’usage des habitants.

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