Le choc des titans

Christine Tréguier  • 14 février 2008 abonné·es

Après avoir acquis 1,6 % de Facebook en janvier, Microsoft vient de lancer une offre « non sollicitée » d’achat sur Yahoo pour la coquette somme de 44,6 milliards de dollars (environ 30 milliards d’euros). Le géant du logiciel, qui a toujours affiché son désir de conquérir Internet, ne s’est finalement vraiment imposé que dans le domaine de la messagerie et du web-mail. Habitué aux pratiques monopolistiques, il a misé sur une politique de rachat et de production de contenus (encyclopédie Encarta, agence d’images Corbis, etc.) et n’a pas su anticiper la montée des sites communautaires. Au contraire de Google, qui s’est contenté d’indexer les contenus fabriqués par d’autres et de commercialiser ses publicités contextuelles. Si la Commission de Bruxelles donne son feu vert au rachat de Doubleclick, numéro un des bannières, il consolidera sa position hégémonique sur le marché de la publicité en ligne. Pour espérer lui faire la pige, Microsoft doit faire vite et acquérir des savoir-faire et une culture Internet qu’il n’a pas. Yahoo a cette culture ; il a également l’avantage d’avoir investi dans deux sites communautaires (Flick’R, site de partage de photos, et Del.icio.us, partage de liens) et dans le rachat de quelques spécialistes de la publicité en ligne. Il vient de lancer sa propre plateforme de liens sponsorisés, Panama, et travaillerait sur un nouveau système baptisé Apax. En difficulté financière depuis deux ans, il était donc un candidat tout désigné.

Mais le marché publicitaire, dont Google draine déjà près de 75 %, est-il faramineux au point que Microsoft s’endette pour ce rachat~? s’interroge le site Kitetoa. On attend toujours les mirifiques revenus des sites communautaires et de l’Internet mobile (accessible depuis les téléphones portables). Une étude réalisée par AOL conclut que « 99 % des utilisateurs ne cliquent pas sur les annonces et 1 % cliquent au moins une fois par mois » . L’alliance ne permet-elle pas tout simplement à Microsoft de regagner un peu d’influence sur le Net, en s’imposant comme n°~2 du moteur de recherche~? «~Yacrosoft~» pèserait 33 %, face aux 58 % de Google. Ce positionnement est d’autant plus nécessaire que Google le menace dans son propre business, en proposant des logiciels non seulement gratuits ou libres, mais utilisables en ligne.

La guerre des titans ne fait que commencer. Google a aussitôt proposé une collaboration à Yahoo. Lequel se dit décidé à décliner l’offre de Microsoft, qualifiée d’insuffisante, et cherche visiblement àfaire monter les enchères. Les autorités antitrust américaines et européennes auront également leur mot à dire.

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