Les «~découpés~» ont gagné

Xavier Frison  • 14 février 2008 abonné·es

Une fois n’est pas coutume, les locataires ont terrassé les spéculateurs. En 2003, les habitants de la résidence du 39 bis, rue de Montreuil, dans le XIe arrondissement parisien, voient le Crédit foncier et la Deutsche Bank racheter les logements de leurs deux petits immeubles (voir Politis n° 830). L’idée est simple pour les investisseurs : revendre « à la découpe » les lots acquis en gros, avec une belle plus-value à la clé. Seulement voilà, les locataires ne l’entendent pas de cette oreille. Rapidement constitués en association, les membres du « 39 bis » défendent pied à pied ces logements sociaux intermédiaires gérés jusqu’alors par la Caisse des dépôts et consignation. Et sortent de leur chapeau un « Projet 39 bis » alternatif, « qui met le vivre-ensemble au coeur des préoccupations » . Presque quatre années de combat plus tard, c’est gagné : près de la moitié de la résidence, soit 21 logements, vient d’être rachetée par deux bailleurs institutionnels, pour être transformée en logements conventionnés. Ainsi, « tous les habitants qui le souhaitaient vont pouvoir conserver leur statut de locataire et rester durablement dans leur logement. Ceux qui le souhaitaient ont pu acheter le leur » , précise l’association. La victoire a été fêtée comme il se doit, le 31 janvier, avec orchestre de cuivres et ballons de rouge, à la galerie Univer, voisine du 39 bis. Denis Gettliffe, président de l’association, pouvait revenir sur des années de procédures acharnées, tout en signifiant qu’ailleurs, dans Paris et dans les grandes villes de France, le combat contre la découpe continue. En effet, si Geneviève Prandi, de l’Observatoire des loyers de l’agglomération parisienne, anticipait avec raison en décembre 2004 dans Politis que le phénomène des ventes à la découpe « ne devrait pas s’intensifier » , il perdure. Tant sur le terrain que sur les bancs de l’Assemblée nationale ^2. Où la majorité n’est pas pressée de juguler une bonne fois pour toutes l’envolée délirante du marché immobilier.

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