Le chômage sanctionné

Thierry Brun  • 15 mai 2008 abonné·es

Le projet de loi sur l’indemnisation du chômage, examiné jeudi 22 mai par le Conseil supérieur de l’emploi, est une contre-réforme aux effets redoutables pour le pouvoir d’achat des salariés, chômeurs ou non. « Loin de mettre en place une quelconque sécurisation des parcours professionnels, les mesures annoncées vont largement dégrader la situation des salariés au chômage et déstabiliser celle de ceux en emploi » , analyse l’association de chômeurs AC !
Une situation également redoutée par une majorité d’organisations syndicales. L’objectif retenu par le gouvernement consiste à atteindre un « taux de chômage de 5 % » à l’horizon 2012 dans « une logique de droits et devoirs renforcés » , alors que le régime d’assurance-chômage n’indemnise que 40 % des chômeurs. Les prétentions gouvernementales ne tiennent aucun compte de l’évolution du marché du travail : l’extension de la précarité sous toutes ses formes (chômage, sous-emploi et emploi inadéquat) concerne plus de 11 millions de salariés.

La future loi créera un « projet professionnel de la personne » (PPP), avec lequel le demandeur d’emploi s’engagera à ne pas refuser plus de deux « offres raisonnables d’emploi » (ORE), sous peine de subir une radiation de deux mois. L’ORE variera selon les cas. Dans les trois premiers mois, l’emploi proposé, situé dans une zone géographique définie, doit s’inscrire dans le projet professionnel et être rémunéré au moins au niveau du salaire antérieur. Au-delà du troisième mois de recherche, l’emploi proposé par l’ANPE devra être « compatible » avec les qualifications, mais le chômeur pourra perdre 5 % de son salaire antérieur.
À partir du sixième mois, le chômeur devra accepter des conditions d’emploi revues à la baisse : le salaire pourra être amputé de 20 % et le trajet pourra atteindre jusqu’à 30 km ou une heure de transport en commun. Au douzième mois, les conditions d’indemnisation seront nettement plus restrictives : l’emploi sera considéré comme acceptable s’il est rémunéré à hauteur de l’allocation-chômage (57,4 % du salaire dans la plupart des cas).
Le projet de loi réunit ainsi un ensemble de mesures très contraignantes qui exerceront inévitablement une forte pression sur les salaires et créeront un effet d’aubaine pour les entreprises.

Temps de lecture : 2 minutes