La colère des magistrats

Ingrid Merckx  • 30 octobre 2008 abonné·es

« Il n’y a pas de problème Dati » , affirmait Roger Karoutchi, le 26 octobre, dans « Dimanche soir politique » (France Inter, I-Télé). Tout dépend pour qui. Sa réforme de la carte judiciaire, la loi sur les peines planchers, la récidive ou la rétention de sûreté, que louait le secrétaire d’État chargé des Relations avec le Parlement, sont précisément à l’origine de la colère des magistrats, qui ne cesse de monter. Soutenus par les greffiers, les éducateurs judiciaires et les surveillants de prison, ils étaient mobilisés le 23 octobre pour exprimer leur refus d’être les « boucs émissaires » d’une « politique du tout-carcéral ». Ils dénoncent des convocations de procureurs pour des propos critiques ou des statistiques décevantes, des « mutations forcées » , des « injonctions contradictoires » , les « inconséquences de la politique pénale » , et « d’incessantes pressions » qui portent atteinte à l’indépendance de la justice.
La même semaine, les syndicats pénitentiaires, découragés par la vague de suicides qui s’ajoute à la pénurie de moyens et à la surpopulation carcérale, annonçaient un blocage des prisons le 13 novembre. Menace finalement levée à la suite d’un rendez-vous pris par la ministre avec l’intersyndicale (Ufap, FO et CGT). Celle-ci aurait obtenu « des engagements fermes » en matière d’embauche, mais sans avoir vu Rachida Dati, ce qui a été ressenti comme une « marque de mépris ». L’entrevue de la garde des Sceaux avec les principaux syndicats de magistrats le 24 octobre s’est, quant à elle, mal terminée : « Incompréhension totale » et « dialogue de sourd » , ont-ils lâché en sortant de son bureau.
La tension est telle que Nicolas Sarkozy a repris la main. Lundi 27 octobre, il invitait à l’Élysée les représentants de l’Union syndicale des magistrats (majoritaire), mais sans convier le Syndicat de la magistrature (de gauche). Jouerait-il la division ? L’opération sent surtout la diversion : aussi fâcheuses que soient ses méthodes, Rachida Dati ne fait qu’appliquer à la lettre les directives du chef de l’État.

Politique
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