Femme de cour

Un portrait de Rachida Dati qui rend compte
de son ascension politique et médiatique.

Jean-Claude Renard  • 26 février 2009 abonné·es

Le titre a le mérite d’être clair. Et juste, tout au long de ce moyen-métrage de Tali Jaoui et Antoine Vitkine. Dati, l’ambitieuse. C’est là un portrait qui ne se laisse pas embarquer par son sujet, ne tombe pas dans l’hagiographie. Et s’ouvre sur une gamine de province, fille d’immigrés, vivant dans un HLM. Un premier tournant dans la vie : maçon, le père travaille dans une école de notables. Subjugué, il y inscrit sa fille, seule musulmane au milieu des catholiques bon teint. Une injonction paternelle : être la meilleure élève. Ça forge des caractères. Puis bac, un passage en fac de médecine, un boulot d’aide-soignante, et la fascination pour les gens de pouvoir repérés dans les magazines.

Deuxième tournant, à 22 ans, la rencontre d’Albin Chalandon, baron du gaullisme, au ministère de la Justice (comme un clin d’œil au destin). Il est son mentor. Qui lui offre une place de comptable chez Elf Aquitaine. Puis maîtrise d’économie à Assas, avant la magistrature. En quête de parrains, elle écrit à tout le bottin mondain (Attali, Lagardère, Veil). Troisième tournant : ses services proposés à Sarkozy, en 2002. Elle devient conseillère technique, chargée de la délinquance. Une besogne discrète avant de s’imposer aux proches et notamment du côté de Cécilia, élément clé du dispositif. Après l’élection de 2007, elle est nommée ministère de la Justice. On connaît la suite.

Pour retracer l’ascension de Rachida Dati, il suffit de gratter les pages ­glacées des magazines ( le Point, Paris Match, l’Express, Voici, Gala… ). Une Rastignac moderne qui a su mettre en scène son itinéraire, satisfaite de son parcours, qui tente de faire bonne figure devant la caméra au cours d’un tournage entamé à l’automne dernier, quand précisément la ministre connaît ses premiers revers.
Face aux réalisateurs, elle botte en touche. Sur la relation avec Cécilia, sur le nombre impressionnant de collaborateurs virés ou démissionnaires, effarés, lassés par ses méthodes brutales et méprisantes. Sans surprise, on observe combien Rachida Dati a su, et sait manœuvrer les gens, elle qui a fait du communautarisme un enjeu personnel. Un symbole des réseaux, des calculs, dans la pérennisation du passe-droit, loin de toute morale républicaine. Une véritable courtisane qui mériterait sa place dans la cour de Louis XV. In fine , la fonction de garde des Sceaux s’effacera devant la garde-robe Dior.

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