De quels droits ? / L’emploi de votre argent

Christine Tréguier  • 2 avril 2009 abonné·es

« 39 49 trop cher ! » Depuis plusieurs semaines, les chômeurs et les associations de défense de précaires clament leur ras-le-bol de se faire taxer par les services publics. Objet de leur colère, le nouveau numéro unique de Pôle emploi, le 39 49. Non seulement le service d’accueil dysfonctionne – attente interminable, pas de conseillers disponibles –, mais ces appels obligatoires pour ouvrir un dossier ou obtenir un rendez-vous sont payants : 0,11 euro depuis une ligne fixe, mais 28 à 29 fois plus cher si on appelle d’un mobile ou d’une box ADSL. Ces numéros dits « spéciaux » sont en effet facturés hors forfait au gré de chaque opérateur.

Inadmissible, ont répondu en chœur Luc Chatel, secrétaire d’État à la Consommation, et Éric Woerth, ministre du Budget, soucieux de ne pas se mettre les chômeurs à dos. Dans une lettre à la Fédération française des télécoms datée du 17 mars, ils ont désigné les coupables : « Alors que les services publics et les entreprises font des efforts financiers importants pour diminuer le coût des appels en faveur des usagers et des consommateurs, ils sont actuellement détournés par certains opérateurs de communications électroniques fixes et mobiles. »

Personne n’est dupe de cette feinte indignation, car le problème n’est pas nouveau. En 2007 déjà, une pétition demandant la suppression des numéros surtaxés et le retour aux numéros géographiques, dans le privé comme dans le public, avait réuni 150 000 signatures. Un rapport d’audit sur l’accueil à distance dans les services publics, remis en juin 2007 par l’Inspection générale des finances, avait souligné la disparité et l’opacité des tarifs ainsi que le manque de coordination dans le développement de ces services. Dans un avis joint au rapport, l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep) avait conclu : « Le développement de l’offre de service à distance des administrations pour leurs usagers […] s’est accompagné d’un transfert d’une partie des coûts d’accueil à la charge de l’usager en l’absence de tout cadre juridique » , et avait préconisé l’utilisation de numéros à dix chiffres commençant par 09, tarifés depuis tout opérateur comme un appel vers un numéro fixe classique. Du coup, le même Éric Woerth avait promis une évaluation pour que « cet objectif de réduction du coût des appels téléphoniques soit envisagé pour l’ensemble des services publics ».

Les choses seront allées plus vite pour le 39 49. Le secrétaire d’État chargé de l’Emploi, Laurent Wauquiez, vient d’annoncer que ce numéro serait comptabilisé dans les forfaits dès avril. Mais pas un mot sur les autres services publics ayant eux aussi recours à des numéros spéciaux, comme la CAF, qui utilise un 0 820 (0,112 euro la première minute et 0,09 euro les minutes suivantes), l’assurance-maladie et son 36 46, ou les impôts et leur numéro en 0 810. Pas question de gratuité non plus car, dixit Wauquiez, « la gratuité peut ouvrir la voie aux abus, aux gens qui vont rester plus que nécessaire au bout du fil. Il faut qu’il y ait une forme de responsabilisation ». C’est bien connu, les chômeurs n’ont rien de mieux à faire qu’appeler Pôle emploi toute la journée.

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