Ligne décroissante

La Confédération paysanne adopte officiellement un projet antiproductiviste et écologique face à la crise.

Patrick Piro  • 7 mai 2009 abonné·es
Ligne décroissante

«Quelle nouveauté ? », s’interrogeaient des participants devant le projet de rapport d’orientation, lors du congrès de la Confédération paysanne (CP) tenu à Saint-Étienne les 28 et 29 avril [^2]. Un titre indémodable (« L’agriculture à l’heure des choix »), une sévère dénonciation du libéralisme mondialisé, responsable de la crise multiforme…

Pourtant, c’est une ligne qui a été franchie. Considérant que la crise signe la « fin d’une ère », les quelque 500 participants ont adopté des orientations qui, pour être familières au sérail, n’avaient jamais été endossées aussi clairement par les instances du syndicat paysan de gauche.
Ainsi, la CP affirme désormais que les solutions ne passent plus par la croissance et le productivisme, et qu’elle favorisera plus fortement qu’auparavant le soutien au travail et à l’emploi. « À l’opposé d’une agriculture fondée sur l’utilisation des ressources fossiles, polluantes et déclinantes, misons sur une agriculture avec des bras, ressource abondante » , précise Régis Hochart, porte-parole sortant. Donc se passer à terme des engrais synthétiques tirés du pétrole ou de la potasse, mais aussi – c’est plus neuf – des pesticides chimiques.

« C’est un grand pas pour notre syndicat, qui se défie d’apparaître comme un organe des paysans bios » , se réjouit Dominique Marion, par ailleurs nouveau président de la Fédération nationale de l’agriculture biologique.
Après avoir assis sa réputation sur la contestation, profil qui explique en partie son douloureux recul aux élections des chambres d’agriculture de 2007 (20,4 % contre 27,8 % en 2001), la CP souhaite désormais apparaître comme un creuset de solutions « pas pour quelques paysans, mais pour tous les acteurs, territoires et publics, qu’il s’agisse de production, d’alimentation ou de santé » , insiste Régis Hochart.
Relocalisation, déconcentration, désintensification, diversification, autonomie, sobriété, souveraineté alimentaire, équilibre environnemental, etc. : le lexique des mots-clés est abondant, mais le syndicat reconnaît qu’il n’a pas de solution toute prête. « Nous sommes riches d’expériences, mais il faut aussi construire en s’alliant plus fortement avec ceux qui pensent comme nous » , estime Jacques Pasquier, président sortant. Syndicats, mouvements sociaux, associations de consommateurs, écologistes, etc. : à Saint-Étienne, c’est un appel presque explicite que les paysans leur ont lancé pour « bâtir une nouvelle civilisation ».

[^2]: Les 40 membres du Comité national ont été élus, le secrétariat national le sera le 19 mai.

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