Le Tour de France de la précarité

Chaque année, la CFDT réalise un tour de France pour défendre le droit des saisonniers. Un été qui s’annonce particulièrement difficile pour ces travailleurs.

Politis.fr  et  Fanny Derrien  • 3 juillet 2009 abonné·es
Le Tour de France de la précarité

38 étapes, 12 régions, le programme est pour le moins chargé. Le bus orange de la CFDT entame dès lundi 6 juillet son dixième tour de France pour défendre les droits des saisonniers. Comme chaque année, secrétaires nationaux et militants locaux vont à leur rencontre dans les lieux touristiques et les régions agricoles. Ce « syndicalisme de proximité » a pour objectif d’informer les travailleurs et de faire valoir leurs droits à partir d’ateliers, de débats mais aussi d’activités festives. Mal lotis, les saisonniers ne bénéficient pas d’un statut comparable à celui d’un salarié. 14 % des jeunes saisonniers travailleraient même sans contrat. Et quand ils sont déclarés, leurs droits sont réduits : ils n’ont pas de prime de 10 % de fin de contrat et sont indemnisés à peine plus de la moitié de ce que perçoivent les autres salariés, tout en cotisant autant qu’eux. Pourtant, « leur poids est considérable dans l’hôtellerie et la restauration, des secteurs-clefs pour un pays touristique comme la France. Ils méritent un peu plus de considération ! » , martèle Hervé Garnier, secrétaire national de la CFDT.

Circonstance aggravante, cette année, « la crise aura un impact sur l’emploi saisonnier. Les gens ne sacrifieront pas leurs vacances, mais ils feront des séjours plus courts ou dépenseront moins » , observe Hervé Garnier. Au niveau des sections locales, on signale déjà des embauches plus tardives, souvent en diminution. Dans le tourisme, les employeurs ont prévu d’adapter les recrutements en fonction du nombre de vacanciers. Dans l’agriculture, les patrons font travailler les saisonniers plus longtemps, en jouant sur la modulation du travail. Cette prudence inquiète la CFDT qui redoute une dégradation des conditions d’emploi des salariés en poste, notamment par la multiplication des heures supplémentaires payées au noir.

En Bretagne, on constate aussi un changement du profil des candidats à l’embauche : « Des personnes de tout âge, sans emploi, sont prêtes à prendre des jobs d’été » , observe la confédération. Travailleurs pauvres, chômeurs et étudiants : tous sont désormais demandeurs d’emplois saisonniers. Une situation nouvelle qui laisse présager une mise en concurrence jouant à la baisse sur les salaires et les conditions de travail. Même si ce mélange des genres peut parfois jouer en faveur des salariés. Dans un restaurant de la côte Atlantique s’est ainsi développée une forme de solidarité intergénérationnelle : « Les travailleurs plus âgés ont informé les jeunes de leurs droits et ont exigé la signature d’une convention collective » , témoigne un militant local de la CFDT.

La campagne « Jobs saisonniers : vos droits ne sont pas en vacances » a pour ambition d’agir au quotidien, en mettant en place des chartes de l’emploi saisonnier avec les collectivités ou en participant à la création de logements. « Un travail de fourmi qui commence à payer » , juge Hervé Garnier. En janvier, les syndicats ont également obtenu une indemnisation chômage plus généreuse pour les saisonniers, avec la possibilité d’être indemnisé dès quatre mois de travail effectués, contre six auparavant. Toujours ça de gagné en attendant la prochaine saison.

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