Le Front de gauche s’étoffe

Les discussions se poursuivent entre les formations de la gauche de gauche. Avec pour objectif désormais de constituer des listes unitaires au mois de mars.

Michel Soudais  • 8 octobre 2009 abonné·es
Le Front de gauche s’étoffe

Le paysage politique bouge à la gauche du PS. Loin des projecteurs médiatiques et des caméras de télévision, les dirigeants des formations de la gauche de gauche discutent, confrontent leurs points de vue. Ce dialogue constructif, de l’avis de tous, a déjà permis de conforter la démarche du Front de gauche dans la durée, et d’envisager raisonnablement la possibilité de listes communes de ce dernier avec les Alternatifs, la Fédération pour une alternative sociale et écologique (FASE) et le Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) aux régionales. Deux déclarations importantes, adoptées les 23 et 28 septembre, dressent l’état des convergences, actent des méthodes de travail et esquissent une nouvelle géographie politique de la gauche radicale en deux cercles.
Le premier cercle comprend les trois organisations constitutives du Front de gauche : le Parti communiste, le Parti de gauche et Gauche unitaire, la petite formation constituée par ceux qui, autour de Christian Picquet, ont refusé au printemps le cavalier seul du NPA. Au lendemain des élections européennes, qui avaient validé leur démarche, toutes trois avaient affirmé le caractère durable de leur alliance. Toutefois, début septembre, les hésitations du PCF sur sa stratégie électorale et sa décision d’organiser des « ateliers du projet » ouverts au PS (Politis n° 1067 et 1068) avaient quelque peu tendu les relations entre les partis de Marie-George Buffet et de Jean-Luc Mélenchon. À la veille de la Fête de l’Huma, où Mme Buffet devait afficher ses bonnes relations avec Martine Aubry, les trois organisations n’avaient pu s’entendre sur un texte. C’est chose faite depuis le 23 septembre.

Dans cette déclaration commune, les signataires « affirment leur ferme volonté de poursuivre [le Front de gauche], de l’élargir et de l’enraciner dans la durée, dans les luttes et dans les urnes » . Ils condamnent les « tentatives de recomposition au centre autour d’alliances avec le MoDem » et récusent «  tout autant l’idée d’organisation de primaires à gauche » qui « réduiraient tout le débat politique à une compétition de personnes, et tout le programme de gauche au plus petit commun dénominateur ».

Le texte annonce surtout « la création d’un comité de liaison permanent du Front de gauche » . Ce dernier, qui se réunissait encore mardi, a la triple tâche de coordonner l’organisation « de grandes campagnes publiques sur les urgences sociales et écologiques » , de « travailler à la poursuite, ­l’élargissement et l’enracinement » de la démarche initiée aux européennes, et d’«  élaborer une plate-forme partagée du Front de gauche » qui affirme les grands axes d’une alternative à la droite et avance des propositions d’urgence face « aux dégâts de la crise capitaliste et du productivisme ».

Le second cercle comprend potentiellement toutes les organisations politiques situées à la gauche du PS. Elles se sont quasiment toutes retrouvées, le 28 septembre, à l’initiative du NPA, pour une réunion qui, au terme de quatre heures de discussion, a débouché sur l’adoption d’un texte qui « décide de constituer un cadre politique national de discussion commun en vue de vérifier la possibilité d’aller ensemble aux régionales ». Certes, cette déclaration, signée par les trois organisations du Front de gauche, les Alternatifs, la FASE, le NPA et le Parti communiste des ouvriers de France (PCOF) – Lutte ouvrière et le Forum social des quartiers populaires, qui assistaient à la réunion, ont demandé un statut d’observateurs –, n’est qu’un « un premier pas » , comme l’indique le texte. Mais les signataires reconnaissent que celui-ci « est important car les enjeux de ces élections sont non seulement régionaux mais nationaux ».

Le texte appelle d’ailleurs à « œuvrer à gagner la majorité des travailleurs et des citoyens aux perspectives ouvertes par une gauche de combat » . Il fait le point sur la situation politique, économique et sociale, apporte son soutien aux grandes mobilisations programmées cet automne, telles « la manifestation pour le droit des femmes du 17 octobre, les marches pour l’emploi, contre la précarité et les licenciements, ou les initiatives en riposte au sommet “climat” de Copenhague » , et affirme les priorités partagées des signataires.

Plusieurs des 39 participants à cette réunion ont noté le comportement constructif de la délégation du NPA – Olivier Besancenot, Pierre-François Grond, Fredéric Borras et Myriam Martin… – qui a notamment accepté, après une suspension de séance, un amendement dont le PCF faisait un point de passage obligé. Celui-ci stipule que «  les forces qui composent la gauche antilibérale et anticapitaliste ont le devoir de tout faire pour battre la droite et offrir une autre voie : un débouché politique qui permette de mettre en œuvre un programme traduisant dans les régions les exigences populaires issues des mobilisations, un programme régional véritablement alternatif au libéralisme et au productivisme ». « Personne ne peut dire que des participations à des exécutifs sont “exclues par le NPA” ; mais les conditions en sont fixées » , se félicite Pierre Cours-Salies, de la FASE.
Sans préjuger des suites des discussions qui devaient commencer mercredi soir au sein d’un groupe de travail plus restreint, ni du fait que les adhérents de chaque parti resteront maîtres d’apprécier le résultat qui en sera donné, la marche vers la présentation de listes unitaires est engagée.

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