Des maux de mots

Jean-Loup Chiflet s’en prend à certains néologismes.

Christophe Kantcheff  • 5 novembre 2009 abonné·es

«À plus » , « faisabilité », « impacter » , « Y a pas photo ! » , combien sont-ils tous ces mots ou expressions sans grâce, au sens plus ou moins approximatif et formant comme des tics de langage ? Le grammairien Jean-Loup Chiflet en a recensé 99, dont la destination à ses yeux ne fait aucun doute : il faut les « foutre à la poubelle ». Diable ! Voilà bien un geste de purificateur de la langue, au reste, plutôt vain. La langue ne sera jamais, tel un éden éthéré, un lieu uniquement fait de bonnes manières, de distinction et de statues en marbre. La langue française est un être vivant, qui respire, lutine avec d’autres langues et accueille des hôtes dont la venue, que ceux-ci soient crasseux ou parfumés, peut être extrêmement féconde. Les néologismes en font partie.

Reste que les considérer d’un œil critique est un bon exercice. On est ainsi reconnaissant, par exemple, de lire sous la plume de Chiflet, que « au jour d’aujourd’hui » est « un double pléonasme sans doute inventé par un bègue » , que la « feuille de route » accompagnant toutes sortes de décisions est probablement le fruit d’une nostalgie guerrière, que « voilà » est de plus en plus utilisé « en veux-tu en voilà » , et que «  Y a pas de souci ! » a remplacé « pas de problème » , mais ne signifie pas la même chose : si le problème renvoie à une difficulté, le souci induit « une inquiétude, un tracas » . Mieux qu’à une action de nettoyage, le petit livre de Jean-Loup Chiflet incite à se moquer gentiment des mots laids.

Culture
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