« Il faut renforcer les liens »

Coordinateur des Marches européennes/Euromarches*, Michel Rousseau évoque ici la situation de « l’autre gauche » dans différents pays européens.

Denis Sieffert  • 5 novembre 2009 abonné·es

Politis : Existe-t-il en Europe, une « gauche de la gauche »
ou une « autre gauche »
qui montre la voie aux
organisations françaises ?

Michel Rousseau : Les générations militantes internationalistes, tiers-mondistes ou même altermondialistes se sont peu intéressées à ce qui se passait en Europe. Après la chute du mur de Berlin, la fin des années 1990 changeait la donne avec les forums sociaux européens. Pour beaucoup, ce fut la découverte de la diversité, mais aussi du commun, entre des organisations associatives, syndicales et politiques européennes. Et le constat que la faillite de l’Union soviétique et de la social-démocratie européenne ouvrait la voie à l’émergence multiforme de recompositions politiques soit écologistes, soit à gauche de la gauche traditionnelle, soit par une combinaison des deux. Même si les principales organisations qui concrétisent cette émergence sont en relation dans le cadre du Parti de la gauche européenne, de la Gauche anticapitaliste européenne, de la GUE/NGL au Parlement européen, leur parcours reste très lié à l’histoire de leur propre pays : on ne peut encore parler d’une « autre gauche européenne » en tant que telle. Mais ce qui se passe chez les uns intéresse les autres, surtout lorsque des dynamiques unitaires engendrent des résultats électoraux significatifs comme en Allemagne avec Die Linke, au Portugal avec le Bloc de gauche, en Grèce avec Syriza.

Quelle est la situation de l’autre gauche dans d’autres pays
en Europe de l’Ouest ?

On ne peut balayer tout le panorama européen en quelques lignes. L’émergence d’une autre gauche se manifeste dans la plupart des pays sous des formes variées, aux évolutions non linéaires, particulièrement dans les processus de convergences. Lorsque des forces se regroupent et que l’une d’entre elles se veut hégémonique, le tout implose comme ce fut le cas avec « Respect » en Grande-Bretagne. L’Italie connaissait une montée en puissance sans précédent des mouvements sociaux. La crise du Parti de la refondation communiste entraîna une spirale de désagrégation laissant la gauche de gauche antilibérale éclatée et perdant ses élus. Aux Pays-Bas, le SP – Parti socialiste, à ne pas confondre avec le parti social-démocrate ! – représente depuis une trentaine d’années la seule force antilibérale implantée dans les quartiers populaires et a connu un développement quasi linéaire. Au Danemark, l’Alliance rouge et verte, « la liste de l’unité », a pour caractéristique de pratiquer avec succès le principe de direction collégiale. Plus récemment, le SP irlandais fait lui aussi une percée lors des dernières élections européennes. Dans d’autres pays, les forces de gauche antilibérales, anticapitalistes, écologistes restent embryonnaires. D’où la nécessité de renforcer les liens au niveau européen, non seulement à l’Ouest, mais aussi à l’Est.

Comment peut-on situer
les organisations qui seront
présentes aux Assises du
changement ?

Les lectrices et lecteurs de Politis connaissent déjà Die Linke , tentative sans précédent de construire une organisation commune entre un ancien parti de l’Est et des secteurs critiques issus de la social-démocratie de l’Ouest. Le Bloc de gauche portugais est le résultat réussi d’une convergence de courants politiques d’extrême gauche, trotskistes, maoïstes, communistes, tous minoritaires au début et rejoints massivement par la suite sur la base de cette nouvelle entité, de ses pratiques et orientations. Synaspismos, puis Syriza, en Grèce, témoignent que des regroupements larges sont possibles mais aussi fragiles, comme on vient de le voir lors des dernières élections. Les invité(e)s européens aux Assises en feront une présentation plus approfondie, en espérant que cela aidera à ce qui serait possible en France…

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