De quels droits ?/ Pas de matricule pour les écoliers

Christine Tréguier  • 17 décembre 2009 abonné·es

Le Collectif de résistance à Bases élèves (CNRBE) poursuit son travail de mobilisation contre le fichage des enfants. Le 9 décembre, ce sont 681 plaintes de parents d’élèves qui ont été déposées dans 24 départements et sont venues s’ajouter aux 1 088 procédures en cours depuis mars. Des parents qui souhaitent exercer leur droit d’opposition pour que les données personnelles concernant leurs enfants ne sortent pas de l’école et qui s’interrogent sur les finalités et le devenir de ce fichier. Après une forte contestation, le ministère avait certes reculé et supprimé les données sensibles, ne laissant que l’État civil et le parcours scolaire. Mais, souligne le CNRBE, ce qui a été défait peut demain être refait sous couvert de répondre aux besoins de la lutte contre l’échec scolaire, la délinquance ou l’immigration illégale. Une crainte partagée par le Comité des droits de l’enfant de l’ONU, qui a interpellé la France sur ce dossier dans son rapport annuel. Même en l’état, Base élèves peut être utilisé à des fins douteuses. Les opposants ont plusieurs fois eu vent de demandes de recherche concernant comme par hasard des enfants aux patronymes à consonance étrangère, transmises aux inspections académiques. Lesquelles sont à même, si les enfants sont scolarisés, de communiquer le nom de l’établissement et l’adresse des parents.

La contestation s’est également cristallisée autour de l’Identifiant national élève (INE). Chaque élève enregistré dans Base élèves lors de son entrée en école primaire se voit affublé d’un numéro matricule. Celui-ci est conservé dans une Base nationale des identifiants élèves (BNIE) pendant trente-cinq ans, associé aux noms, date et lieu de naissance et établissements fréquentés. 45 millions d’enfants y seront à terme répertoriés. Pour quoi faire ? Gérer le système éducatif et réaliser des statistiques, répond le ministère. Dans une Lettre ouverte aux enfants, un statisticien s’étonne pourtant de la conservation de ces données nominatives : « J’ai appris durant toute ma scolarité qu’il ne fallait jamais réaliser une base comme la BNIE et qu’il y avait bien d’autres chemins pour obtenir les mêmes résultats statistiques. »
Pour le CNRBE, c’est la porte ouverte aux croisements de fichiers. Un risque également évoqué par le Comité des droits de l’enfant, qui a souligné « l’insuffisance des dispositions légales propres à prévenir l’interconnexion (NDLR : de Base élèves) avec les bases de données d’autres administrations ».

Mettant à profit la célébration de l’anniversaire de la Convention internationale des droits de l’enfant, le CNRBE a saisi la Rapporteuse spéciale sur la situation des défenseurs des droits de l’homme. Rappelant que, contrairement à la France, les directeurs d’école refuzniks ne font que respecter cette Convention et défendre les droits des enfants et de leurs familles, il lui demande de s’opposer aux sanctions prises par l’inspection académique de l’Isère à l’encontre de cinq chefs d’établissement. Cette demande est soutenue par la LDH, qui a elle aussi écrit à la Rapporteuse.

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