Travail de sape sur les retraites

Le gouvernement fixera le calendrier de la réforme des retraites le 15 février. Et prépare le terrain à un allongement de la durée de cotisation et à un relèvement de l’âge du départ des salariés.

Thierry Brun  • 21 janvier 2010 abonné·es

Y aura-t-il vraiment un débat sur la prochaine réforme des retraites ? Nicolas Sarkozy a donné rendez-vous le 15 février aux partenaires sociaux pour fixer l’agenda social, dont cette réforme sera l’un des principaux chantiers. Mais le gouvernement aborde ce débat de manière biaisée en préparant le terrain à un allongement de la durée de cotisation et à un relèvement de l’âge de la retraite. Si l’on en croit les récentes déclarations, « assurer » le financement des retraites passe par cette voie. Devant les parlementaires, Xavier Darcos a levé une partie du voile : « Dans un pays dont l’espérance de vie s’accroît d’un trimestre chaque année, nous n’avons d’autre solution que de travailler plus longtemps » , a déclaré le mi­nistre du Travail.
Lors de ses vœux à la presse, François Fillon a joué lui aussi sa partition : « Nous connaissons tous les instruments qui sont à notre disposition : les cotisations, la durée légale d’activité, l’âge de départ à la retraite. » Et, dimanche, Claude Guéant, secrétaire général de l’Élysée, a à son tour laissé entendre que l’allongement de la durée de cotisation était privilégié, tout en promettant que « le choix sera fait en concertation avec les partenaires sociaux ».

Le gouvernement peut compter sur le report en avril, c’est-à-dire après les élections régionales, de la ­présentation du document du Conseil d’orientation des retraites (COR) pour sensibiliser l’opinion. Il s’appuiera aussi sur les sondages. L’un d’eux, venant de l’Ifop, institut dirigé par Laurence Parisot, présidente du Medef, n’est pas passé inaperçu. Publié dans le Journal du dimanche  (du 10 janvier), il indiquait que les Français seraient prêts à cotiser davantage et à travailler « le plus longtemps possible pour se garantir une retraite suffisante » . Toujours pour préparer le terrain à quelques semaines du début des discussions, des chiffres alarmistes ont été publiés dans le Figaro  (du 15 janvier), annonçant que le déficit des régimes de retraite, qui est déjà de 10 milliards d’euros, devrait atteindre 70 à 100 milliards d’euros à l’horizon 2040-2050.

Sur sa gauche, le gouvernement ne trouvera pas une vigoureuse opposition du Parti socialiste contre cette réforme. La Première secrétaire, Martine Aubry, a souhaité être associée au débat et a ajouté qu’elle pouvait accepter que l’âge de départ à la retraite soit porté à 61 ou 62 ans, « mais à condition qu’on traite le problème de la pénibilité et qu’on traite le problème de l’activité des seniors » , sujets très sensibles pour l’opinion et les syndicats. Alors que les tractations n’ont pas encore commencé, Roselyne Bachelot, mi­nistre de la Santé, s’apprête précisément à supprimer la reconnaissance de la pénibilité pour les infirmières des hôpitaux publics en les alignant sur le régime général, en échange de la reconnaissance de leur formation au niveau bac + 3.
Le gouvernement entend cependant faire de cette question de la pénibilité une contrepartie à sa réforme. Alors que les négociations avec le Medef sur le sujet sont restées dans l’impasse, il espère ainsi ­convaincre des syndicats très remontés contre ses orientations, en particulier la CFDT.

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