« La seule offre politique neuve »

Pierre Juquin* a accepté de présider le comité de soutien à la liste Europe Écologie-Auvergne pour les régionales. Il s’explique sur cet engagement.

Patrick Piro  • 25 février 2010 abonné·es

POLITIS : Quel est le sens de votre soutien à Europe Écologie ?

Pierre Juquin : Dès la fin des années 1980, j’ai défendu la nécessité d’un rapprochement intime entre le social et l’écologie. Sans beaucoup de succès à la présidentielle de 1988… Un éminent « rénovateur » du parti communiste m’avait alors répondu que c’était un programme « pour dans vingt ans ». Voilà, nous y sommes. La question sociale est toujours aussi fortement posée par la crise capitaliste, mais plus encore désormais avec la crise écologique.
L’écologie politique est pour moi une manière de repenser avec force le socialisme. Elle est une réponse de fond à une crise qui met en cause à terme le système capitaliste, générateur d’inégalités de plus en plus insupportables.

Elle subit actuellement des attaques de la part de certains, comme Élisabeth Badinter ou Claude Allègre, qui la ravalent au rang d’une philosophie naturaliste régressive. C’est un contresens profond. Je considère l’écologie – qui nous montre que les humains sont la cause principale de la crise mais qu’ils en détiennent aussi la clé de sortie – comme la plus humaniste des pensées scientifiques et politiques. Le principe de précaution, brocardé par les défenseurs du capitalisme, est une expression du « principe de responsabilité » du philosophe Hans Jonas : responsabilité que l’humanité est appelée à exercer vis-à-vis d’elle-même, des générations futures et de l’ensemble du vivant.

Les Verts, auxquels vous avez adhéré un temps, ont un programme social. Quoi de plus avec Europe Écologie ?

Les Verts ont eu le mérite de créer une dynamique, mais je n’y ai pas trouvé l’élan que j’espérais. Ils n’ont pas su surmonter les divisions au sein de la mouvance de l’écologie. Alors qu’Europe Écologie veut s’élargir à de nouvelles catégories sociales, d’autres secteurs que le périmètre des Verts. Au nom de notre comité de soutien à la liste Bouchardy, j’ai fait appel à des syndicalistes, des militants ouvriers, etc.

Pour ancrer Europe Écologie à gauche ou bien de « Bové à Lepage », comme le souhaite Daniel Cohn-Bendit ?

Il y a débat au sein des écologistes à propos des alliances, pourquoi pas ? Et puis Europe Écologie n’est pas réductible à Cohn-Bendit et aux icônes qui l’entourent. Je considère cependant que Corinne Lepage a une vision écologiste juste et des propositions très intéressantes sur le droit, la démocratie, la justice, la Constitution. En Auvergne, les dirigeants de son parti, Cap21, ont rejoint notre comité de soutien. C’est une rupture claire et assumée avec le MoDem.
La diversité des composantes de l’écologie ne doit pas empêcher le rassemblement afin de créer un meilleur rapport de force. Nous voulons nous adresser au plus grand nombre, notamment au monde du travail. La pratique politique nécessite des compromis, pourvu qu’ils s’établissent dans la clarté et qu’ils soient constamment au service de l’essentiel. Je crois avoir démontré, tout au long de ma carrière politique, que je ne faisais pas de concessions avec mes convictions.

Pourquoi ne pas avoir choisi de soutenir le NPA, le Front de gauche ou la Fédération, aux discours plus sociaux qu’Europe écologie, et qui se réclament désormais de l’écologie ?

Belle opération de verdissement ! Ce qui est déjà un succès pour l’écologie… J’ai coutume de dire que je n’ai pas d’ennemis dans le camp de l’anticapitalisme. Mais il faudra plus que quelques déclarations pour me convaincre que ces listes veulent aller au fond des choses. Où prend-on en compte la gravité de la crise écologique, l’importance de changer les modes de production et de consommation ? Je ne vois pas cette véritable relecture du socialisme chez Marie-George Buffet ou Jean-Luc Mélenchon.
Europe Écologie, c’est aussi un certain souffle, la seule offre politique neuve en France et en Europe ! Je constate, sur le terrain, qu’elle peut avoir un effet mobilisateur auprès de ceux qui rejettent la politique, chez les jeunes et les plus défavorisés, entre autres. In fine, c’est la recherche d’une alternative. Il faut essayer.

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