Des papiers pour tous

En lutte depuis six mois, les travailleurs sans papiers sont soutenus par des organisations patronales.

Laurence Texier  • 15 avril 2010 abonné·es

Plus de 6000 travailleurs sans papiers tiennent toujours le piquet de grève, après six mois de mobilisation. Ce mouvement entamé il y a tout juste deux ans a connu un premier acte qui a conduit à la régularisation de 2800 d’entre eux en 2008, pour l’instant restée sans suite.

Le mouvement des travailleurs sans papiers tente d’obtenir des critères précis de régularisation, et cette revendication s’oppose à la très controversée circulaire du 24 novembre 2009, inspirée par le ministre de l’Immigration, Éric Besson. « Monsieur Besson ment lorsqu’il dit que sa circulaire fixe des critères objectifs de régularisation, lorsqu’il parle d’un an d’ancienneté dans l’entreprise ou de cinq années de présence en France » , rejette Raymond Chauveau, délégué CGT. « Déposer des dossiers de régularisation, c’est envoyer les gars à la roulette russe. »

Alors, pour en finir avec le « pouvoir discrétionnaire » des préfectures, les 6 263 travailleurs sans papiers en grève ont cessé de demander leur régularisation. Soutenus par un collectif de syndicats (notamment la CGT, la CFDT et l’Unsa) et d’associations (entre autres, Droits devant !! et la Ligue des droits de l’homme), les grévistes, employés par près de 2 000 entreprises, peuvent dorénavant compter aussi sur les organisations patronales. La CGPME, Ethic, le Syndicat national des activités du déchet et Veolia propreté ont en effet rallié le mouvement. « Une grande partie du patronat est d’accord pour dire qu’il s’agit d’un problème économique et social, commente Raymond Chauveau. On est arrivé à une approche commune et à un texte qui doit être mis sur la table et débattu avec le ministère du Travail. »

Désormais, le collectif veut traiter ce dossier avec le nouveau ministre du Travail, Éric Woerth, et non avec Éric Besson, une exigence qui n’a pu aboutir pour l’heure. Raymond Chauveau se veut pourtant optimiste quant à l’issue du mouvement : « On a quelques élus de droite, des associations, des représentants du patronat avec nous. » Jean-Claude Amara, porte-parole de Droits devant !!, estime que « l’opinion publique a compris que l’acharnement répressif et stigmatisant du gouvernement vis-à-vis des sans-papiers avait des fins électoralistes » . Une avancée significative dans la reconnaissance de ces travailleurs, qui cotisent et payent des impôts au même titre que tout salarié, redonnerait un espoir aux 200 000 et 400 000 travailleurs sans papiers. Ce qu’attend aujourd’hui le collectif, c’est leur régularisation globale : pour Jean-Claude Amara, « il n’y a pas d’autre solution. Sinon, dans vingt ou trente ans, ce sera exactement le même problème » .

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