Libre-échange sans limite

Alors qu’une majorité de citoyens souhaitent une Europe sociale, fondée sur des principes de solidarité, c’est un système reposant sur la concurrence qui leur est imposé.

Thierry Brun  • 1 juillet 2010 abonné·es

L’élargissement sans critères de convergence sociale ou fiscale était déjà une aberration. Que dire de la création d’un « grand marché transatlantique » ? « La désagrégation de l’Union européenne dans une grande zone de libre-échange irait à l’opposé du souhait d’une majorité d’Européens d’une Europe sociale, basée sur des principes de solidarité » , estimait-on en mai 2006 ( Politis n° 903). « Ce souhait, exprimé notamment par les “non” au traité constitutionnel européen (TCE) en mai 2005, a peu de chance d’être écouté » , indiquait aussi cet article prémonitoire, montrant que les accords de libre-échange, système commercial poussé par les multinationales, reposant sur l’absence de barrières douanières et non-douanières à la circulation des biens et des services, sont la nouvelle arme économique du néolibéralisme.
C’est pourtant « quelques semaines après les “non” français et néerlandais au TCE et à la fameuse “concurrence libre et non faussée” » que la décision d’aller vers un tel marché est prise. Un programme de travail commun est rapidement mis en place par l’administration de George W. Bush et Bruxelles pour concrétiser une ambition qui remonte à avril 1998, après l’échec de la signature d’un accord multilatéral sur l’investissement (AMI) au sein de l’OCDE et d’un New Transatlantic Market (NTM) qui, à l’époque, est mis sur la table des négociations par Leon Brittan, commissaire européen au Commerce extérieur. Mais quelques semaines plus tard, en mai 1998, le NTM ressurgit sous le nom de Partenariat économique transatlantique (PET) entre les États-Unis et l’Union européenne. Il est adopté par Bill Clinton et Jacques Santer, président de la Commission européenne, au sommet du G8 à Birmingham. Ce projet fit l’objet d’une levée de boucliers au Parlement européen et parmi les mouvements altermondialistes.

Plus récemment, en catimini, l’Union européenne s’est lancée dans un accord de libre-échange avec le Canada, un AMI en puissance et l’un des plus importants accords économiques et commerciaux. « L’accord entre le Canada et l’Europe sera plus ambitieux que les accords négociés à l’OMC » , résumait Politis, le 29 avril, et cette année est décisive pour son avenir.

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