Questions à propos d’un rapt

L’enlèvement de salariés d’Areva renvoie à une pratique de pillage économique directement héritée du colonialisme.

Denis Sieffert  • 23 septembre 2010 abonné·es

On ne disposait toujours d’aucune information, mardi, sur le sort de cinq Français, un Togolais et un Malgache, employés d’Areva et de la firme du BTP Vinci, enlevés le 16 septembre à Arlit, au nord du Niger, par un groupe armé. On suppose tout au plus qu’ils ont été conduits au Mali. Laissons de côté ici la polémique sur la sécurité de ces salariés de grands groupes français dans une zone réputée dangereuse.

Selon les rares témoins, il semble que les hommes en armes aient pu pénétrer dans la zone dite « sécurisée » d’Arlit sans la moindre difficulté. Au-delà de l’incrimination rapide d’un groupe identifié comme appartenant aux réseaux Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI), on ne pose guère la question de la présence du leader français – et mondial – du nucléaire en territoire étranger. La rébellion touarègue lancée en 2007 a notamment pour revendication une meilleure répartition des juteux revenus miniers.

Areva tire près de 40 % de sa production d’uranium de ce pays classé parmi les trois plus pauvres de la planète. Depuis quarante ans, comme le soulignait récemment un collectif d’associations, le groupe français (anciennement Cogema) spolie les populations de leurs terres, sans égard pour la faune et la flore, et sans précautions contre la contamination par des poussières et des gaz radioactifs. Les terroristes d’aujourd’hui, qu’on les assimile à Al-Qaïda ou à des rebelles touaregs, ne sont donc pas venus de nulle part. Il faut évidemment souhaiter un dénouement heureux pour les otages. Mais il faut aussi espérer une remise en cause plus profonde de pratiques coloniales.

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