Travailleurs oubliés

La réforme ne prend en compte qu’a minima la pénibilité au travail et le handicap.

Thierry Brun  • 14 octobre 2010 abonné·es

Les victimes de l’amiante de l’Andeva et les accidentés du travail de la Fnath se sont rappelés au bon souvenir du ­ministre du Travail, Éric Woerth, qui n’a cessé de soutenir une réforme des retraites contenant « un dispositif majeur » , une « grande avancée sociale » en matière de pénibilité au travail. Venus de toute la France, 5 000 militants des deux organisations ont infirmé ces propos et manifesté dans Paris pour réclamer « une vraie reconnaissance de la pénibilité » et des départs anticipés, dans un projet de réforme qui n’a été modifié qu’à la marge.

« Le volet pénibilité, même modifié, reste profondément injuste et discriminant » , affirment l’Andeva [^2] et la Fnath, qui rejettent une réforme qui « ne prend en compte que les victimes du travail ayant un taux d’incapacité d’au moins 10 %, avec, qui plus est, des conditions draconiennes » .

Les personnes exposées à des ­cancé­rogènes, notamment l’amiante, dont la maladie – souvent mortelle – se développe généralement après le départ en retraite, sont exclues de la réforme, encore en débat au Sénat. Or, « une étude vient de confirmer que deux tiers des cancers d’origine professionnelle se déclarent après l’âge de la retraite » , soulignent les deux organisations, qui indiquent que la réforme « va exclure des milliers de travailleurs soumis durant leur vie professionnelle à des conditions de travail dont on sait qu’elles réduisent sensiblement leur espérance de vie sans entraîner une incapacité médicalement constatée à 60 ans » .

Les assurances données par Nicolas Sarkozy aux associations de personnes handicapées, lors d’une rencontre qui s’est déroulée le 13 septembre, n’ont pas satisfait la Fnath : les demandes ont été prises en compte « aux minima du minima » , estime l’association des accidentés de la vie, qui rappelle que les travailleurs handicapés du secteur privé devront présenter une durée ininterrompue de cotisations de 30 années et un âge minimal de 55 ans pour partir en retraite anticipée. « Pire encore puisque les fonctionnaires ne semblent pas concernés par cette amélioration » et donc ne pourront disposer de la retraite anticipée, ce qui crée « une discrimination » .

Depuis le début des débats au Sénat, la Fnath constate que le gouvernement maintient un « dispositif d’invalidité “bis” » , en lieu et place « d’un véritable dispositif de pénibilité, déniant ainsi toute réalité au rejet massif qui s’est exprimé ces dernières semaines dans l’opinion publique » .

[^2]: L’Andeva organise le 19 octobre à Paris, autour de l’Assemblée nationale, une marche des veuves et victimes de l’amiante. Une délégation sera reçue à l’Assemblée nationale.

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