Des banques alternatives

Thomas Coutrot  • 9 décembre 2010 abonné·es

Attac réclame la socialisation des banques, c’est-à-dire leur mise sous contrôle public et citoyen, en commençant par la constitution d’un pôle public bancaire. L’écho important, y compris au plan international, des déclarations d’Éric Cantona confirme que beaucoup de citoyens veulent se réapproprier le système bancaire. Le cas irlandais est emblématique, où les élites saignent la population pour sauver les banques. Or, le problème fondamental aujourd’hui, c’est le décalage entre l’exaspération populaire contre les dérives absurdes de la finance et le sentiment d’impuissance. Nous contribuerions, à notre manière, à ce sentiment d’impuissance si nous nous contentions de proclamer nos solutions politiques globales – certes justes mais pas d’une actualité immédiate – sans chercher à fournir des outils aux citoyens pour peser concrètement sur la situation.

L’initiative d’Éric Cantona vaut pour sa dimension politique. Il n’y a aucune possibilité de mobiliser assez de gens dans ce type d’action pour mettre les banques réellement en danger. Une panique bancaire ( bankrun ) ne s’organise pas, elle est toujours spontanée, quand les gens pensent que leur banque va faire faillite. L’action de retrait collectif politiquement organisé ne peut toucher qu’une minorité. Son intérêt est ailleurs : dans le débat qu’elle suscite dans de très larges couches de la population, du fait de l’immense popularité du personnage.

Le problème de l’initiative est qu’on ne peut pas se passer des banques. Retirer l’argent, mais pour le mettre où ? Hormis la Banque postale (qui a pris la voie de la privatisation) ou les banques mutualistes (qui sont malheureusement aujourd’hui des acteurs majeurs du casino financier global), il n’y a pas vraiment d’alternative aux banques capitalistes. L’initiative de Cantona pose donc la question : comment construire d’authentiques banques alternatives, indépendantes des marchés financiers, et contrôlées démocratiquement par leurs sociétaires et les citoyens ? Ainsi, la Nef souhaite lancer une Banque éthique européenne avec d’autres partenaires européens ; une campagne de mobilisation citoyenne serait très utile pour soutenir ce projet qui, pour déboucher, doit recevoir l’agrément de l’autorité de régulation financière (l’Autorité de contrôle prudentiel), a priori plutôt hostile.

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