Parutions

Politis  • 16 décembre 2010 abonné·es

Portraits d’une lutte, « les Molex » pour mémoire
_ Éric Cabanis, éditions Arcane 17, 96 p., ill., 23 euros.

Le combat des salariés de Molex à Villemur-sur-Tarn est un moment d’histoire des victimes d’un capitalisme actionnarial débridé. Nul doute que les historiens auront du grain à moudre avec l’histoire de l’usine de Molex, expliquent les sociologues Stéphane Beaud et Michel Pialoux (auteurs de Retour sur la condition ouvrière, Fayard, 1999). La lutte des classes, expression que beaucoup voudraient voir reléguée aux oubliettes, s’y est jouée en condensé. Ce livre est un point de vue des ouvriers, laissés sur le carreau par un groupe américain. Ces licenciés ont un visage, une parole, une dignité, excellemment rendus par Éric Cabanis, reporter-photographe à l’Agence France presse. Cet ouvrage donne à voir et offre une tribune à ceux qui, habituellement, se taisent, ajoutent aussi les deux universitaires Éric Darras et Alexendra Oeser dans leur préface. Et il est un formidable témoignage à chaud du combat emblématique mené à Villemur.

La Crise de la croyance économique
_ Frédéric Lebaron, éditions du Croquant, 234 p., 21 euros.

Comment une crise cyclique, même d’ampleur inhabituelle,
a-t-elle pu prendre en quelques mois les traits d’une profonde crise structurelle du capitalisme mondial ? Pour répondre à cette question, le sociologue Frédéric Lebaron propose plusieurs éclairages sur les multiples processus qui ont conduit à un effondrement boursier et à une baisse de la production mondiale. Point fort de ce livre, l’analyse de la « crise de sens » provoquée par l’effondrement économique de 2008, mettant en cause un « capitalisme historique » incapable de proposer une organisation économique
stable et juste.

Démocratiser l’économie,le marché à l’épreuve des citoyens
_ Tarik Ghezali et Hugues Sibille, éditions Grasset, 138 p., 12 euros.

Ce livre est un laboratoire destiné à remettre la société en mouvement. Les expériences et pratiques décrites et analysées veulent contribuer à démocratiser l’économie. Certains exemples proposés par Hugues Sibille, ex-délégué interministériel et vice-président du Crédit coopératif, et Tarik Ghezali, délégué général du Mouvement des entrepreneurs sociaux et coanimateur du Labo de l’économie sociale, sont parfois discutables, mais ils ont le mérite de redonner une place aux citoyens dans les décisions économiques. Les auteurs défendent une vielle idée qui nous est chère : l’économie est plurielle, et les citoyens en sont des acteurs au même rang que l’État et le marché. On l’a compris, ils rejettent l’ultralibéralisme dominant et sont attachés à la solidarité collective aussi bien qu’à la liberté individuelle qu’on peut observer dans les sociétés de personnes, telles les mutuelles, coopératives et associations.

L’Imprévisible 2011
_ Par Pierre Bazantay, éd. Le jeu de la règle (11, rue des Cordeliers, 14000 Caen, www.lejeudelaregle.fr), 384 p., 20,11 euros.

Les lecteurs de Politis le connaissent maintenant très bien. Pour la quatrième édition de ce livre-agenda, objet inclassable et ludique, l’équipe de l’Imprévisible (c’est-à-dire celle de « La Caravane d’interventions institutionnelles », entendez Marie-Liesse Clavreul et Thierry Kerserho, éditeurs et auteurs des précédentes années) s’est allouée la plume alerte de l’écrivain Pierre Bazantay. C’est lui qui a mené à bien cette cuvée 2011, avec, comme à chaque fois, de multiples références à des événements (pointés en bas de page) ayant eu lieu au cours d’une année se terminant par le chiffre 1. Décision a d’ailleurs été prise que, désormais, un nouvel auteur viendra, chaque année, personnaliser cette recherche sur la langue et les expressions de notre temps, déclinées au fil des 365 jours du calendrier. Et ce, jusqu’en 2017, date où l’Imprévisible aura exploré une décennie à part entière. L’édition 2011, d’aussi belle facture que les années précédentes, offrira à ses « lecteurs » la joie d’ouvrir leur journée avec un sourire, de la « journée du copier-coller » (2 avril), ou celle « des dégâts collatéraux » (15 mars), à la « journée sans commentaire » (28 décembre)…

Idées
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