Un black-out gouvernemental ?

Ivan du Roy  • 27 janvier 2011 abonné·es

Y aura-t-il en France un débat public sur l’exploitation des gaz de schiste ? On connaît la propension du pouvoir à cultiver l’opacité en matière de choix énergétique, le nucléaire par exemple. Les gaz de schiste semblent prendre la même pente : des permis d’exploration délivrés en toute discrétion en 2010 suivis, comme par hasard, d’une réforme du code minier décidée ce 19 janvier par ordonnance par Éric Besson, en charge de l’Industrie. Mais la pression monte. Trois cents personnes se sont réunies fin décembre, aux côtés du député européen José Bové, sur le plateau du Larzac – intégré dans une zone de prospection – pour constituer un comité de vigilance. France Nature environnement et Les Amis de la Terre se sont saisis du problème. Europe Écologie-Les Verts et le Parti de gauche demandent un moratoire. Tous souhaitent l’organisation d’un débat public. À l’Assemblée nationale, une première interpellation a visé, le 13 janvier, la ministre Nathalie Kosciusko-Morizet : la Région Rhône-Alpes « ne peut accepter d’être un terrain d’exploitation d’hydrocarbures liquides ou gazeux qui aura pour première conséquence […] de devenir un vaste secteur géographique pollué de métaux lourds particulièrement toxiques » , lui écrit le député PS Jean-Jack Queyranne, également président de la Région. Il demande l’annulation pure et simple des permis d’exploration.

La bataille s’annonce acharnée. Car, en face, l’industrie pétrolière et gazière ne lâchera pas facilement son nouveau filon. Quitte à balayer les maigres efforts consentis pour réduire notre dépendance aux hydrocarbures. Selon elle, les réserves en gaz de schiste seraient pharaoniques et permettraient de retarder de plusieurs décennies la fin programmée des ressources en gaz naturel. C’est tout un secteur qui flaire la bonne affaire : les majors de l’énergie (Total, GDF-Suez, ExxonMobil, BP, Shell…) comme leurs équipementiers, la tristement célèbre compagnie Halliburton – qui s’est considérablement enrichie grâce à la guerre d’Irak – ou le Français Vallourec, connu pour soigner ses actionnaires. Ils feront tout pour lever la moindre contrainte, au nom de l’indépendance énergétique de l’Europe. Et de leurs profits à court terme.

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